Sur le bord de la route qui mène à l’aéroport international Rafic-Hariri de Beyrouth, plusieurs bâtiments mitoyens de l’Hôtel Golden Plaza ont été réduits à l’état de gravats et de ferraille. Une frappe israélienne, menée dans la nuit de samedi 5 à dimanche 6 octobre, a laissé un cratère béant, dont se dégage encore de la fumée. Les immeubles alentours sont recouverts d’une pellicule de cendre grise. Des membres du Hezbollah surgissent, en scooter et en voiture, lorsque l’on s’approche du site.
L’un d’eux affirme que la frappe a visé un entrepôt de bouteilles d’oxygène médical et une école iranienne. « Tu connais Avichay Adraee ? Eh bien, samedi, dans la nuit, il a publié un ordre d’évacuation pour trois bâtiments de la Dahiyé [la banlieue sud de Beyrouth], dont celui-ci, et ils ont bombardé peu de temps après », explique l’homme sur son scooter.
Au Liban, tout le monde suit désormais le compte X du porte-parole arabophone de l’armée israélienne, Avichay Adraee. Ceux qui ne sont pas sur les réseaux sociaux sont alertés, sur leur téléphone, par leurs proches, qu’« Avichay » vient de diffuser un nouvel ordre d’évacuation. L’homme est présenté, dans la presse libanaise, comme « l’oiseau de mauvaise augure d’Israël ». Chaque soir, et parfois en journée, le communicant militaire désigne, cartes à l’appui, des immeubles voire des quartiers entiers de la banlieue sud.
Frappe spectaculaire
Ces annonces sont suivies de bombardements dont le fracas résonne dans la ville jusqu’au cœur de la nuit. Celle de samedi à dimanche a été la plus intense avec pas moins de trente explosions. La nuit suivante, des frappes ont été suivies d’explosions secondaires, signe de la présence d’armes. L’armée israélienne dit viser des infrastructures militaires du Hezbollah – dépôts d’armes, centres de commandement… Des immeubles d’habitation et des établissements civils sont aussi touchés. Vendredi, l’hôpital privé Sainte-Thérèse a suspendu ses services, faisant état d’« immenses dégâts » dans cet établissement dirigé par des religieuses.
Certaines frappes interviennent sans avertissement. C’est le cas notamment des assassinats ciblés qui ont visé des responsables politiques et militaires du Hezbollah, ainsi que des formations palestiniennes affiliées au parti chiite. Dans la nuit de jeudi à vendredi, une frappe spectaculaire a ainsi visé la Dahiyé qui a été ressentie avec plus de force encore dans Beyrouth que celle qui a tué, le 27 septembre, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah.
L’armée israélienne dit avoir visé Hicham Safieddine. Chef du conseil exécutif du Hezbollah, et cousin maternel de Hassan Nasrallah, le sexagénaire coiffé du turban noir des sayyid (les descendants du prophète Mahomet) est pressenti pour lui succéder. Cet érudit, membre du Conseil de la choura, la plus haute instance du parti, désigné « terroriste » par le département d’Etat américain en 2017, présidait à nombre d’événements religieux et politiques du parti. Proche de l’Iran, il s’est taillé la réputation d’homme impitoyable.
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