Nicole Belloubet l’avait concédé d’une phrase évasive devant la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport, au Sénat, le 3 avril. Pour rendre les 683 millions d’euros demandés à l’éducation nationale dans le cadre du plan de 10 milliards d’euros d’annulations de crédits pour 2024, « [il faut] faire des choix », avait reconnu la ministre de l’éducation nationale, sans que les arbitrages en question fassent jamais l’objet d’une communication politique. Les consignes traduisant les mesures d’économie que les rectorats ont commencé à adresser à tous les établissements scolaires, lundi 29 avril, ont donc pris de court les personnels de direction, chez qui la sidération le dispute à une colère grandissante.
Dans les académies de Paris, Créteil, Versailles ou encore Lyon, les autorités ont fait savoir par courriel aux personnels de direction que, « en application du décret (…) du 21 février portant annulation de crédits, une mesure de réduction des dotations des heures supplémentaires et des indemnités pour mission particulière a été notifiée » à l’académie. Par conséquent, les dotations attribuées pour l’année 2023-2024 « feront l’objet d’un ajustement », est-il explicité. Le ministère de l’éducation nationale confirme au Monde que toutes les académies sont concernées.
Dans les établissements, on se dit « estomaqué », « catastrophé », « révolté » par ce retrait de moyens qui concerne tous les établissements, y compris ceux de l’éducation prioritaire, et met en péril de nombreux dispositifs des collèges et lycées, que deux mois séparent encore de la fin des cours.
Les heures supplémentaires dont il est question sont à la main des établissements et rémunèrent les enseignants qui assurent des stages de remise à niveau durant les vacances, des actions de soutien ou de préparation aux examens, des remplacements de courte durée ou encore de l’aide au devoir (le dispositif baptisé « Devoirs faits ») au collège. Plus de 7,5 millions de ces heures ont été effectuées en 2023, pour un coût de 333 millions d’euros. Les « indemnités pour mission particulière » servent, elles, au paiement de missions accomplies hors du temps d’enseignement aux élèves, comme la coordination d’activités sportives ou artistiques ou la fonction de référent numérique ou handicap. Elles ont représenté plus de 161 millions d’euros en 2023.
Des retraits de moyens inédits
L’application de gestion des heures supplémentaires a été bloquée pour les chefs d’établissement dès lundi soir. Comme pour le pacte enseignant, dont le ministère a repris les enveloppes inutilisées au début d’avril, tous les crédits non consommés à ce stade de l’année ont été repris par les rectorats pour étudier leur réduction. Une partie pourra être restituée au cas par cas, en fonction des besoins. Le principe de la rémunération des services effectués n’est « pas remis en cause », assurent les académies alors que beaucoup d’enseignants ayant déjà réalisé des missions, parfois depuis plusieurs mois, n’ont pas encore touché la rémunération afférente.
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