L’homme n’a jamais su de quoi demain serait fait, mais a, depuis la nuit des temps, tenté de dialoguer avec le futur, qu’il soit craint, espéré ou fantasmé. Alors même que le futur de l’humanité apparaît particulièrement incertain aujourd’hui, Rebecca Lamarche-Vadel, directrice de Lafayette Anticipations, à Paris, et commissaire de l’exposition « Coming Soon. En attendant demain », a imaginé une fourmillante exploration, avec un large spectre d’œuvres en matière de géographies, d’époques et de médiums, des relations entretenues avec cet inconnu.
Elle s’ouvre par une stèle dédiée à Ptah, dieu du panthéon égyptien, l’un des prêts du Louvre, un ex-voto en calcaire notamment gravé d’une oreille qui avait pour fonction de faire entendre à Ptah les prières et requêtes d’un certain Iouny. S’ensuivent une série d’oracles, ces figures dotées d’une capacité à prédire l’avenir, où l’on croise l’aveugle Tirésias, l’un des personnages de L’Odyssée, d’Homère, qui interprétait le langage des oiseaux, représenté à la fin du XVIIIe siècle par l’artiste romantique suisse Johann Heinrich Füssli, ainsi qu’une étonnante vidéo de Nggamdu.org (l’une des sept productions de l’exposition), montrant une tradition de divination du Cameroun, le ngam du, qui consiste à poser des questions à une araignée souterraine, par l’intermédiaire de bouts de papier qu’elle réarrange.
Regarder vers l’inconnu
Autres tentatives de connexion entre mondes humain et non-humain : les toiles de prédictions et d’invocations météorologiques d’Alexandru Chira (1947-2011), artiste issu d’un milieu rural en Roumanie, ou encore les portraits en majesté (autre production de l’exposition), par Marguerite Humeau, de plantes de rien (chardon, fougère, euphorbe) et pourtant « bio-indicatrices », c’est-à-dire révélatrices de l’état de santé de la terre sur laquelle elles poussent.
La partie « Déchiffrer l’inconnu » se penche sur les outils divinatoires, de tablettes mésopotamiennes, utilisées pour former les devins aux présages à partir du foie ou des intestins d’animaux sacrifiés, aux cartes de tarot : celles, délicates, aux influences mexicaine et égyptienne, de la peintre surréaliste Leonora Carrington (1917-2011), conçues dans les années 1950 pour son usage personnel, et celles de la jeune artiste et médium française Lisa Signorini.
On y trouve également des archives sur la lecture de l’avenir dans le marc de café, une pratique qui serait d’origine mésopotamienne et s’est répandue dans l’Empire ottoman, puis dans les Balkans et l’Europe centrale vers la fin du XVIIIe siècle, ici détaillée par Romany Marie (1885-1961), qui réunissait la bohème de Manhattan dans son café de Greenwich Village.
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