L’AVIS DU « MONDE » – À VOIR
Des cheveux strictement tirés en arrière, un uniforme impeccablement repassé, un visage qui ne quitte jamais une expression de dureté, Jessica Comley est une agente des douanes et de la police des frontières en poste à la lisière de l’Arizona et du Mexique. Là où fut édifié, à partir de 2006, un mur destiné à séparer les Etats-Unis de son voisin. Saisie au plus banal de ses tâches quotidiennes faites d’attente, de contrôle de véhicules et de longues patrouilles dans le désert, la jeune femme cache, derrière une forme de zèle mutique, une personnalité complexe, opaque et tortueuse. The Wall est donc, avant tout, le portrait d’une femme, un portrait porté par une actrice, Vicky Krieps, d’une force et d’une subtilité exceptionnelles. Jessica Comley semble ne douter de rien, et pourtant sa raideur n’est que le témoignage d’une fragilité cachée. C’est une solitaire qui paye des inconnus pour quelques minutes de sexe.
Un personnage qui défie les conventions
Elle semble se croire investie d’une mission quasi divine, celle de défendre son territoire de l’intrusion de tous ceux qui incarnent, pour elle, une altérité coupable, les migrants clandestins et les Amérindiens locaux soupçonnés de leur venir en aide. Mais c’est aussi une femme meurtrie par la maladie fatale de sa belle-sœur et meilleure amie, sa rupture avec sa propre mère, avec qui elle ne peut plus parler, un père dont elle ne voit peut-être pas l’influence maléfique. Là est la force du film de Philippe Van Leeuw, dans la part insondable d’une protagoniste à laquelle il est à la fois impossible de s’identifier et pour laquelle une forme d’empathie se déclenche. Le film joue ainsi habilement et cruellement avec les émotions d’un spectateur face à un personnage qui défie les conventions et les opinions à l’emporte-pièce.
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