Livre. A quoi ressemble un procès pour terrorisme vu de l’intérieur – et plus précisément, du point de vue de l’avocat de la défense ? C’est l’exercice original auquel s’est prêté Vincent Brengarth dans Défendre l’impossible (Michalon, 2024). Très présent dans les dossiers touchant aux droits humains et aux libertés publiques, ce jeune avocat au barreau de Paris s’est aussi spécialisé dans la matière terroriste. En défense, c’est une tâche ingrate et peu rémunératrice, dans laquelle on échoue plus qu’à son tour avec un sentiment de « joué d’avance » encore plus fort en appel qu’en première instance.
La justice antiterroriste, à force de précautions de sécurité et d’exceptions juridiques, est devenue une matière quasiment à part, avec ses cours d’assises sans jury populaire, ses enquêteurs anonymes et en visio, et ses parties civiles qui occupent une place exponentielle. Une fois renvoyé devant le tribunal, l’accusé a très peu de chances d’échapper à une condamnation, que l’opinion, mais aussi bien des juges, estiment aussi méritée que nécessaire.
Avant d’entrer dans son récit, Vincent Brengarth détaille la principale spécificité du droit antiterroriste : une invention française intitulée « association de malfaiteurs terroriste ». C’est une infraction − délictueuse ou criminelle − protéiforme qui fait que l’on est considéré comme membre d’un groupe terroriste dès lors que l’on a apporté son concours matériel − y compris de manière assez marginale − au groupe ou à l’un de ses membres en connaissance de la nature terroriste du groupe. Peu importe si un attentat était en projet, a été commis ou a été déjoué.
Dissuader, apaiser
La partie la plus passionnante du livre est le récit au jour le jour, à la manière d’un journal, du procès en appel de l’attentat au camion bélier de Nice, le 14 juillet 2016. Le client de Vincent Brengarth, Oualid G., doit-il chercher à se présenter sous son meilleur jour, au risque d’être accusé de « taqîya » (dissimulation des opinions religieuses) ? Comment égrainer les éléments de la plaidoirie à venir sans l’éventer mais en construisant une démonstration qui met en relief les failles du dossier et des témoignages des enquêteurs ou des témoins à charge ? Est-il possible de retourner un président qui semble convaincu de la culpabilité de l’accusé ?
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