Dans le halo des lampes torches, deux oursons apparaissent au pied d’un arbre. Ils regardent derrière eux, vers la forêt. S’avancent pour boire dans un baquet que la pluie vient de remplir. Leur mère a été tuée à quelques mètres de là, dans une ruelle de la ville roumaine de Predeal : le 30 mars, elle avait grièvement blessé le chef des services de secours en montagne de la commune. Depuis, ces deux ours âgés de 18 mois viennent régulièrement dormir ici, au pied d’un immeuble défraîchi. Laura Niculescu et son mari, George, les observent, sans crainte. Leur portable sonne, un message d’alerte s’affiche : un ours est signalé dans une autre rue.
Comme les autres localités de la vallée de Prahova, dans le sud des Carpates roumaines, Predeal s’étale au milieu des bois. Ses pistes de ski, ses villas et ses hôtels attirent les touristes. « Ici, chaque rue mène à la forêt, insiste Laura Niculescu. Qu’est-ce que les gens s’attendent à voir sortir des bois ? Des flamants roses ? », demande-t-elle. Imposante dans son long manteau noir, cette femme de 48 ans, que ses amis surnomment « Mama Bear » (« maman ourse »), passe plusieurs soirées par semaine à pister les ours bruns de la région. Elle suit les aboiements des chiens signalant leur présence. Elle sait où ils traversent la ville, à proximité de maisons inhabitées. Elle connaît les quartiers où des poubelles traînent.
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