Plus de 10 milliards d’euros de contrats commerciaux et d’engagements financiers seront annoncés à l’issue de la première visite d’Etat du président français au Maroc, a fait savoir l’Elysée. La moitié de ce montant a été officialisée, lundi 28 octobre au soir, lors d’une cérémonie au palais royal de Rabat présidée par Emmanuel Macron et le roi Mohammed VI, devant un parterre de ministres et de chefs d’entreprise français et marocains.
Les signatures portent sur vingt-deux accords, présentés comme ayant été « agréés » par les deux chefs d’Etat. Les plus importantes ont trait à la transition énergétique et aux interconnexions électriques, la diplomatie française voyant dans la production de renouvelables au Maroc un moyen de décarboner l’économie du royaume et d’acheminer de l’énergie verte en France.
Les grandes lignes d’un accord-cadre bilatéral sur la coopération énergétique ont été dévoilées au même moment. A la demande de l’Elysée, son contenu a été piloté par l’ancien patron d’Engie et de Suez Gérard Mestrallet, actuel envoyé spécial du président pour le projet de couloir logistique d’intégration entre l’Europe et l’Asie, et Xavier Piechaczyk, président du directoire de RTE, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité en France.
Comme révélé par Le Monde dimanche 27 octobre, l’un des investissements les plus significatifs vient d’Engie. L’électricien a conclu un partenariat estimé dans sa première phase à 3,5 milliards d’euros avec l’Office chérifien des phosphates (OCP), l’un des plus grands producteurs mondiaux de phosphates et d’engrais. A travers une coentreprise, dont la date de création n’a pas été fixée, les deux groupes envisagent des projets communs dans les énergies renouvelables, leur stockage, les infrastructures électriques, l’hydrogène vert et le dessalement.
Boucle électrique de 600 km au nord du Maroc
Le potentiel de production d’énergie bas carbone est évalué à 2 gigawatts (GW) d’ici à 2027 et à 6 GW d’ici à 2032. La construction au nord du Maroc d’une boucle électrique de 600 kilomètres, reliant plusieurs sites industriels d’OCP, est également prévue, avec une possible extension vers le sud au Sahara occidental. Le nombre exact des projets n’est pas encore défini, mais leur montant pourrait atteindre 17 milliards d’euros sur les dix prochaines années.
Une autre major française, TotalEnergies, a signé de son côté un projet pilote d’hydrogène vert, évalué à 2 milliards d’euros, en vue de la production d’électricité à partir d’énergies solaire et éolienne. Plusieurs dizaines de milliers d’hectares de terres seront allouées au groupe, a annoncé l’Elysée, sans donner plus de détail.
Toujours dans le volet énergétique, un troisième accord concerne EDF Renouvelables pour la deuxième phase du parc éolien de Taza, au nord du royaume. Mais il ne s’agit pas d’une surprise, la filiale du groupe public français ayant déjà mis en service la première phase de ce parc en 2022.
Quant aux rumeurs qui allaient bon train sur l’annonce, au premier jour du voyage présidentiel, de la participation de l’électricien au projet d’autoroute électrique entre Dakhla et Casablanca, qui doit permettre de transporter de l’électricité verte produite au Sahara occidental, elles ont été démenties. EDF confirme au Monde avoir répondu à l’appel à manifestation d’intérêt lancé par l’Office national de l’électricité et de l’eau potable marocain, mais son résultat se fait encore attendre après six reports en moins d’un an.
Les entreprises françaises attendaient la réconciliation
En bonne place dans les accords qui ont été signés au palais royal, le secteur ferroviaire a lui aussi fait l’objet d’annonces. La principale concerne Alstom, qui a finalement été désigné comme « soumissionnaire privilégié » pour la fourniture de douze à dix-huit rames à grande vitesse. Le processus d’appel d’offres étant toujours en cours, l’industriel s’est refusé à tout commentaire.
Suivez-nous sur WhatsApp
Restez informés
Recevez l’essentiel de l’actualité africaine sur WhatsApp avec la chaîne du « Monde Afrique »
Rejoindre
Selon nos informations, son PDG, Henri Poupart-Lafarge, n’a pas voyagé dans les avions présidentiels qui ont atterri lundi à Rabat. Arrivé la veille, il poursuivait lundi encore les négociations avec l’Office national des chemins de fer du Maroc (ONCF). Le marché est évalué entre 450 et 750 millions d’euros, le nombre exact des rames, qui seront toutes produites en France, faisant encore l’objet de discussions.
Preuve que les entreprises françaises attendaient la réconciliation entre Paris et Rabat, certaines signatures ont dû patienter jusqu’au déplacement au Maroc du chef de l’Etat. C’est le cas d’Egis. Son directeur général n’a paraphé que lundi le contrat d’assistance à la maîtrise d’ouvrage pour la future ligne à grande vitesse Kénitra-Marrakech, d’un montant de 130 millions d’euros, alors que cela fait des mois que la société d’ingénierie a remporté le marché. « L’appel d’offres a été gagné en mai et le résultat annoncé en août, mais il fallait un moment politique propice pour conclure », confie une source.
Peu avant cette cérémonie, à l’issue de son tête-à-tête avec Mohammed VI, Emmanuel Macron a convié le monarque à une visite d’Etat en France. Le dernier déplacement officiel du roi du Maroc à Paris remonte à 2018. Il sera reçu en 2025, indique l’Elysée, ajoutant que sa venue marquera « la suite du processus de refondation des relations » entre les deux pays.