24 février 2022 : des blindés russes traversent la frontière ukrainienne, marquant le début de l’invasion illégale du pays. Sur les antennes de RT et le site de Sputnik, on célèbre le début d’une « opération militaire spéciale » qui doit mettre fin au « nazisme ukrainien ». Le 2 mars, les deux médias d’Etat russes sont interdits de diffusion sur le territoire européen. Un an plus tard, leurs maisons mères respectives seront aussi visées par des sanctions économiques très contraignantes.
Entre-temps, Meta, la maison mère de Facebook, a pris les devants : les principales pages des deux entreprises sont bloquées en Europe dès le 28 février. A la même période, Facebook retire également les deux médias des programmes de partage de revenus que propose le réseau social.
Mais, à la fin de 2022, plusieurs pages liées à Sputnik figurent à nouveau dans les listes des « partenaires » de Facebook, d’après les propres données de transparence de Meta, compilées et analysées par l’ONG What to Fix et publiées dans un rapport, jeudi 19 juin. Le 6 octobre 2022, Sputnik France et Sputnik Italia réapparaissent ainsi dans les programmes « in-stream ads » (partage des revenus sur les publicités affichées sur la page) et « ads on reels » (partage de revenus pour les publicités vidéo) ; la page allemande du média russe suit, puis, en mars 2023, sa page principale. Enfin, en juillet de la même année, Meta accepte une toute nouvelle page de RT, en langue arabe, dans son partenariat de publicités vidéo – RT arabic a pourtant été interdite de diffusion européenne cinq mois plus tôt.
Obligation de résultat
Meta a-t-elle contrevenu aux sanctions européennes ? « Il faut bien comprendre que les sanctions prises après l’invasion de l’Ukraine contre les médias d’Etat russes reposent sur deux logiques distinctes », pose Charlotte Beaucillon, professeure de droit public à l’université Paris-Est Créteil et spécialiste des sanctions européennes : « L’interdiction de diffusion concerne uniquement la diffusion des contenus produits par les médias listés, tandis que les sanctions économiques interdisent de mettre à disposition tout “financement ou ressource économique” aux personnes listées. »
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