C’est l’une des premières choses que l’on apprend en arrivant en Californie : d’où vient l’eau. Manifestement, Donald Trump n’a pas eu droit à la leçon de géographie – ou il n’en a retenu que ce qui l’arrangeait. Sur les incendies de Los Angeles, il n’en démord pas. La catastrophe, qui a fait 28 morts et détruit plus de 17 000 maisons, est due aux démocrates qui gouvernent la Californie. S’ils avaient « ouvert le robinet » de l’eau qui coule dans le nord de l’Etat, Los Angeles n’aurait pas brûlé. « Nous aimons l’eau, a proclamé le président américain, vendredi 24 janvier, en visitant Pacific Palisades, l’un des quartiers dévastés. C’est plutôt efficace pour éteindre les incendies. »
Les experts ont ressorti leurs manuels. Leçon numéro un : il n’existe ni « robinet » ni valve magique qui permettrait d’apporter l’eau du nord de l’Etat jusqu’à Los Angeles, ont-ils rappelé. Dans le nord de la Californie, l’eau vient du réservoir de Hetch Hetchy, dans le parc national de Yosemite, à 300 kilomètres à l’est de San Francisco. Dans le Sud, à Los Angeles, l’eau vient principalement de la rivière Owens, à l’est de la Sierra Nevada.
Leçon numéro deux : quand les incendies se sont déclarés, le 7 janvier, il y avait assez d’eau dans les réservoirs du sud de l’Etat. L’hypothétique eau supplémentaire n’y aurait rien changé. La faillite a été celle des infrastructures, insuffisantes pour que les pompiers, débordés par la violence du vent et privés de l’appui des moyens aériens, puissent pomper immédiatement assez d’eau. Depuis le 1er octobre 2024, Los Angeles n’avait reçu que 3 % des précipitations moyennes (contre 90 % à San Francisco).
En fait, l’eau à laquelle le président s’intéresse de près est celle du delta des fleuves Sacramento et San Joaquin, un lacis de rivières qui se jettent dans la baie de San Francisco. Très convoitée, elle alimente l’aqueduc de Californie, qui irrigue la vallée centrale agricole – au cœur des comtés républicains. Ceux-ci se plaignent qu’une partie de l’eau leur soit soustraite pour protéger l’environnement et plus spécifiquement le delta smelt (Hypomesus transpacificus), un poisson d’eau douce de 5 à 7 centimètres de long figurant depuis 1993 sur la liste des espèces en danger. Un « poisson essentiellement inutile », a tranché, le 8 janvier, Donald Trump, qui le poursuit de sa vindicte depuis près de dix ans.
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