A moins de vingt-quatre heures de l’entrée en vigueur de droits de douane sur les importations aux Etats-Unis, le président américain, Donald Trump, a de nouveau défendu sa politique, jeudi 31 juillet, alors que de nombreux pays tentent d’arracher des accords commerciaux dans la dernière ligne droite.
Voici ce que l’on sait à ce stade :
• Fin des discussions vendredi
Un certain nombre de surtaxes doivent être appliquées dès le 1er août à la plupart des partenaires commerciaux des Etats-Unis, dont certaines, sectorielles, très lourdes, à l’image des 50 % prévues sur le cuivre. Et, cette fois, l’administration Trump a assuré qu’il n’y aurait pas de nouveau report. « Tout sera fait vendredi », a assuré jeudi le secrétaire au commerce, Howard Lutnick, déclarant : « Ces taux ne seront plus sujets à discussion après [vendredi]. »
Pour environ 80 pays, dont les Vingt-Sept, les droits de douane appliqués à leurs produits devraient donc augmenter dès vendredi, pour se situer entre 11 % et 50 %, selon l’origine des produits. Mais la plupart de ces accords concernent en réalité des cadres de négociations, pas des textes formels signés. La Maison Blanche se montrant volontairement floue, pour mettre en avant ses succès.
• Sept accords trouvés jusque-là
Le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont conclu le premier accord en mai, prévoyant la réduction de 27,5 % à 10 % des droits de douane sur les voitures et le reste des importations de produits manufacturés britanniques, ainsi qu’une exemption des droits pour le secteur aérospatial. Londres, qui négocie toujours des exemptions pour l’acier et l’aluminium, a accepté, en contrepartie, d’ouvrir davantage son marché à l’éthanol et au bœuf américains.
Le Vietnam s’est entendu au début de juillet avec les Etats-Unis sur une surtaxe de 20 %, et non de 46 % comme initialement programmé, alors que ces derniers constituent son principal marché d’exportation, notamment pour le textile et les chaussures. L’accord prévoit cependant de doubler le taux à 40 % pour les produits conçus ailleurs et qui ne font que transiter par le Vietnam par des méthodes dites de transbordement.
L’accord-cadre trouvé avec l’Indonésie à la mi-juillet prévoit des droits de douane de 19 % sur les produits indonésiens importés aux Etats-Unis, loin de la menace de 32 % un temps brandie. D’après Washington, Jakarta a accepté de dispenser la quasi-totalité des produits américains de droits de douane et de reconnaître les normes américaines pour les véhicules ou encore les produits pharmaceutiques.
L’Union européenne (UE) et Washington ont conclu dimanche, lors d’une rencontre en Ecosse entre Donald Trump et Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, un accord-cadre imposant des droits de douane de 15 % sur la plupart des produits européens importés – bien inférieur à la menace de 30 %, malgré les critiques formulées notamment en France. L’accord exempt de taxe les équipements aéronautiques, tandis que « certains produits agricoles » seront exemptés de taxation à 15 %, sans que plus de précisions aient pour l’instant été données. Les négociations se poursuivent pour certaines filières afin de tenter d’obtenir de nouvelles exemptions, tandis que l’UE s’est engagée à effectuer pour 750 milliards de dollars (656 milliards d’euros) d’achats d’énergie et 600 milliards d’investissements supplémentaires aux Etats-Unis.
Le Japon a également conclu mardi un accord commercial avec l’administration Trump, qui comprend notamment des surtaxes douanières de 15 % sur les produits nippons importés aux Etats-Unis, alors que le pays était menacé d’un relèvement à 25 %.
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Selon l’accord également annoncé mardi, Les Philippines se sont déjà entendues avec la Maison Blanche, avec à la clé des surtaxes moins élevées que celles qui étaient annoncées initialement : les droits de douane ont été fixés à 19 %, contre 20 % annoncés au début de juillet.
La Corée du Sud, alliée-clé de Washington en matière de sécurité, a réussi à arracher in extremis, jeudi, un accord de 15 % pour ses exportations vers les Etats-Unis, soit nettement moins que les 25 % que Donald Trump avait précédemment menacé d’imposer. La présidence sud-coréenne a déclaré que les droits de douane sur les automobiles, l’un des principaux produits d’exportation de Séoul, resteraient, eux, à 15 %.
Surtaxes politiques contre le Brésil et l’Inde
Donald Trump utilise ces droits de douane comme moyen de pression économique mais aussi politique. Le Brésil devrait être le pays le plus touché, avec 50 % de surtaxe imposés par les Etats-Unis en représailles aux poursuites engagées contre son ex-président Jair Bolsonaro, accusé d’une tentative de coup d’Etat après sa défaite à l’élection présidentielle de 2022. Il s’agit d’une « chasse aux sorcières », selon Donald Trump, son allié.
Le locataire de la Maison Blanche a signé un décret en ce sens mercredi, effectif à compter du 6 août. Selon le décret, la surtaxe se justifie par « la menace inhabituelle et extraordinaire que constitue le Brésil pour la sécurité nationale, l’économie et la politique étrangère des Etats-Unis ».
Concernant l’Inde, M. Trump a, outre des droits de douane de 25 %, également annoncé mercredi une « pénalité » non spécifiée pour les achats d’armes et d’énergie russes par New Delhi. « Peu m’importe ce que l’Inde fait avec la Russie. Ils peuvent faire sombrer leurs économies mortes ensemble, pour ce que ça m’importe », a écrit le président sur sa plateforme, Truth Social.
Le Canada, Taïwan, la Suisse et le Mexique en suspens
Aucun accord n’a pour l’instant été trouvé avec le Canada, dont l’économie est très dépendante de son voisin. Et le fait qu’Ottawa ait annoncé mercredi son intention de reconnaître l’Etat de Palestine rend « très difficile » tout accord commercial futur, a déclaré Donald Trump.
Il avait précédemment déclaré qu’il porterait les droits de douane à 35 % sur les produits canadiens si aucun accord n’était conclu d’ici au 1er août. Les négociations, suspendues en juin à la suite de l’instauration par Ottawa d’une taxe sur les services numériques, se déroulaient déjà dans un climat diplomatique tendu, alimenté notamment par les propos provocateurs de M. Trump sur le Canada en tant que potentiel « 51e Etat américain ».
De son côté, Taïwan, menacé d’une taxe de 32 % et de possibles nouveaux droits de douane sur les semi-conducteurs, pilier de l’économie de l’île, a annoncé jeudi avoir atteint « un certain consensus » avec les Etats-Unis, sans fournir de détail quant au taux convenu.
La Suisse, elle, est toujours dans l’attente d’une décision de la Maison Blanche concernant les droits de douane. Au début d’avril, l’administration Trump avait fixé la barre à 31 % pour les produits helvétiques, et Berne avait immédiatement choisi la voie de la négociation. Le gouvernement suisse a signé le 4 juillet une déclaration d’intention commune, mais qui « nécessite l’approbation des deux parties », a expliqué jeudi le ministère des finances. « C’est dans les mains des Etats-Unis », a déclaré mardi la présidente de la Confédération suisse, Karin Keller-Sutter, dans un entretien avec la radio-télévision suisse (RTS).
Alors que Donald Trump avait menacé le Mexique de porter la surtaxe à 30 %, il a annoncé jeudi sur son réseau, Truth Social, s’être mis d’accord avec son homologue mexicaine, Claudial Sheinbaum, pour prolonger de quatre-vingt-dix jours les droits de douane actuellement imposés sur les produits mexicains.
Cela revient à maintenir à 25 % les droits de douane sur les produits entrants aux Etats-Unis en dehors de l’accord de libre-échange Canada – Etats-Unis – Mexique (ACEUM), ainsi que les droits de douane spécifiques sur l’automobile, l’acier et l’aluminium.
Le cuivre taxé à 50 % et fin de l’exemption sur les petits colis
Donald Trump a signé une « proclamation » amenant les droits de douane concernant le cuivre à 50 % à compter de vendredi, mais uniquement sur les produits fabriqués avec du cuivre, et pas le métal brut, ce qui rassure les professionnels du secteur. Cette mesure est destinée à favoriser la production américaine de ce métal, indispensable notamment aux équipements militaires et à la production de nombreux biens de consommation.
La Maison Blanche a également annoncé mercredi la suppression de l’exemption de taxes sur les petits colis entrant aux Etats-Unis à compter du 29 août prochain. L’exemption permettait jusqu’ici d’envoyer par colis postal des biens d’une valeur inférieure à 800 dollars sans avoir à payer de surtaxe lors de leur entrée sur le sol américain. Les petits colis seront ainsi taxés au même niveau que les autres produits provenant du pays d’origine, ou avec un taux spécifique selon le type du produit et son origine.
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