Initialement attendus le 1er août – à l’échéance de la date butoir fixée par Washington pour finaliser des discussions –, les nouveaux droits de douane imposés par Donald Trump aux partenaires commerciaux des Etats-Unis entreront en vigueur le 7 août. Le président américain a signé, jeudi 31 juillet en début de soirée, le décret sur ces nouvelles taxes qui seront appliquées aux importations dans le pays, pierre angulaire de son programme visant à « restructurer le commerce mondial au bénéfice des travailleurs américains », selon un document de la Maison Blanche.
Le report de la mise en application de ces tarifs doit permettre aux douanes de s’organiser pour la collecte, a fait savoir un responsable de la Maison Blanche à la presse.
Ces surtaxes s’échelonnent entre 15 % et 41 % selon l’origine des produits, les plus élevées concernant la Syrie, et certaines, sectorielles, sont très lourdes, à l’image des 50 % prévues sur le cuivre. D’une manière générale, la plupart des pays cités se voient imposer 15 % de droits de douane, quelques Etats se retrouvant à un taux plus élevé, à l’image de l’Afrique du Sud (30 %), de la Serbie (35 %), de la Suisse (39 %) ou du Laos (40 %). L’Algérie est concernée par une surtaxe de 30 %, et des pays qui n’étaient pas visés par une surtaxe punitive entrent par ailleurs dans la liste, à l’instar de la Turquie (désormais 15 %).
De nombreuses capitales ont tenté d’arracher auprès de Washington des accords commerciaux dans la dernière ligne droite, l’administration Trump ayant affirmé qu’il n’y aurait pas de nouveau report. « Tout sera fait vendredi », avait assuré le secrétaire au commerce, Howard Lutnick, déclarant : « Ces taux ne seront plus sujets à discussion après. »
• Sept accords ont été trouvés jusque-là
Les accords conclus jusqu’à présent sont le plus souvent des cadres de négociations aux détails assez vagues, devant ultérieurement déboucher sur des documents plus approfondis.
Le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont conclu le premier accord en mai, prévoyant la réduction de 27,5 % à 10 % des droits de douane sur les voitures et le reste des importations de produits manufacturés britanniques, ainsi qu’une exemption des droits pour le secteur aérospatial. Londres, qui négocie toujours des exemptions pour l’acier et l’aluminium, a accepté, en contrepartie, d’ouvrir davantage son marché à l’éthanol et au bœuf américains.
Le Vietnam s’est entendu au début de juillet avec les Etats-Unis sur une surtaxe de 20 %, et non de 46 % comme initialement programmé, alors que ces derniers constituent son principal marché d’exportation, notamment pour le textile et les chaussures. L’accord prévoit cependant de doubler le taux à 40 % pour les produits conçus ailleurs et qui ne font que transiter par le Vietnam par des méthodes dites de transbordement.
L’accord-cadre trouvé avec l’Indonésie à la mi-juillet prévoit des droits de douane de 19 % sur les produits indonésiens importés aux Etats-Unis, loin de la menace de 32 % un temps brandie. D’après Washington, Djakarta a accepté de dispenser la quasi-totalité des produits américains de droits de douane et de reconnaître les normes américaines pour les véhicules ou encore pour les produits pharmaceutiques.
L’Union européenne (UE) et Washington ont conclu, dimanche, lors d’une rencontre en Ecosse entre Donald Trump et Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, un accord-cadre imposant des droits de douane de 15 % sur la plupart des produits européens importés – bien inférieur à la menace de 30 %, malgré les critiques formulées notamment en France. L’accord dispense de taxe les équipements aéronautiques, tandis que « certains produits agricoles » seront exemptés de taxation à 15 %, sans que plus de précisions aient pour l’instant été données. Les négociations se poursuivent pour certaines filières afin de tenter d’obtenir de nouvelles exonérations, tandis que l’UE s’est engagée à effectuer pour 750 milliards de dollars (656 milliards d’euros) d’achats d’énergie et pour 600 milliards de dollars d’investissements supplémentaires aux Etats-Unis.
Le Japon a également conclu, mardi, un accord commercial avec l’administration Trump, qui comprend notamment des surtaxes douanières de 15 % sur les produits nippons importés aux Etats-Unis, alors que le pays était menacé d’un relèvement à 25 %.
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Selon un accord également annoncé mardi, Les Philippines se sont pour leur part déjà entendues avec la Maison Blanche, avec à la clé des surtaxes moins élevées que celles qui étaient annoncées initialement : les droits de douane ont été fixés à 19 %, contre 20 % annoncés au début de juillet.
La Corée du Sud, alliée-clé de Washington en matière de sécurité, a réussi à arracher in extremis, jeudi, un accord de 15 % pour ses exportations vers les Etats-Unis, soit nettement moins que les 25 % que Donald Trump avait précédemment menacé d’imposer. La présidence sud-coréenne a déclaré que les droits de douane sur les automobiles, l’un des principaux produits d’exportation de Séoul, resteraient, eux, à 15 %.
Surtaxes politiques contre le Brésil et l’Inde
Donald Trump utilise certes les droits de douane comme un moyen de pression économique, mais aussi politique. Le Brésil devrait ainsi être le pays le plus touché, avec 50 % de surtaxe imposés par les Etats-Unis en représailles aux poursuites engagées par la justice de ce pays contre son ex-président, Jair Bolsonaro, accusé d’une tentative de coup d’Etat après sa défaite à l’élection présidentielle de 2022. Le locataire de la Maison Blanche a signé un décret en ce sens mercredi, effectif à compter du 6 août. Selon ce document, la surtaxe se justifie par « la menace inhabituelle et extraordinaire que constitue le Brésil pour la sécurité nationale, l’économie et la politique étrangère des Etats-Unis ».
La surtaxe douanière infligée au Brésil par les Etats-Unis est « injuste », mais la situation est « plus favorable » que prévu à la faveur d’exemptions pour certains produits, a toutefois déclaré, jeudi, le ministre des finances du pays sud-américain ; Fernando Haddad a annoncé qu’il allait s’entretenir prochainement avec son homologue américain, le secrétaire au Trésor Scott Bessent. « Il va y avoir un cycle de négociations », a-t-il ajouté, sans évoquer de date.
Concernant l’Inde, Donald Trump a, outre des droits de douane de 25 %, également annoncé, mercredi, une « pénalité » non spécifiée pour les achats d’armes et d’énergie effectués auprès de la Russie par New Delhi. « Peu m’importe ce que l’Inde fait avec la Russie. Ils peuvent faire sombrer leurs économies mortes ensemble, pour ce que ça m’importe », a écrit le président américain sur sa plateforme Truth Social.
Le Canada voit les taxes qui frappent ces produits alourdies
Aucun accord n’a pour l’instant été trouvé avec le Canada, dont l’économie est très dépendante de son voisin. Ottawa voit même les droits de douane appliqués à ses produits passer de 25 % à 35 %, une taxe qui ne concerne que les marchandises ne transitant pas dans le cadre de l’accord de libre-échange Canada – Etats-Unis – Mexique (Aceum). « Le Canada n’a pas été en mesure de coopérer afin de réduire le flot de fentanyl et d’autres drogues », entrant aux Etats-Unis, a regretté la Maison Blanche dans un document, pour justifier cette décision, « et il a pris des mesures de représailles contre les Etats-Unis ».
Le fait que le Canada ait annoncé, mercredi, son intention de reconnaître l’Etat de Palestine rend « très difficile » tout accord commercial futur, avait déclaré Donald Trump.
Les négociations, suspendues en juin à la suite de l’instauration par Ottawa d’une taxe sur les services numériques, se déroulaient déjà dans un climat diplomatique tendu, alimenté notamment par les propos provocateurs du locataire de la Maison Blanche sur le Canada en tant que potentiel « 51e Etat américain ».
Taïwan, la Suisse et le Mexique en suspens
De son côté, Taïwan, menacé d’une taxe de 32 % et de possibles nouveaux droits de douane sur les semi-conducteurs, une industrie pilier de l’économie de l’île, a annoncé qu’il chercherait à obtenir une baisse des surtaxes américaines. « Les Etats-Unis ont annoncé des droits de douane temporaires de 20 % pour Taïwan, avec la possibilité de réductions si un accord était conclu », a écrit, vendredi, le président Lai Ching-te sur Facebook, affirmant que son gouvernement « s’efforcerait d’obtenir un niveau raisonnable de droits de douane ».
La Suisse, elle, subit un contrecoup puisque la Maison Blanche prévoit désormais d’imposer une surtaxe de 39 % sur ses produits, plus que ce qui était envisagé par Washington. Début avril, l’administration Trump avait fixé la barre à 31 % pour les produits de la Confédération, et Berne avait immédiatement choisi la voie de la négociation. Les Etats-Unis sont un gros débouché pour la Suisse qui y exporte surtout des médicaments, mais aussi des montres, des machines, des capsules de café, du fromage et du chocolat.
Le gouvernement suisse a signé, le 4 juillet, une déclaration d’intention commune, mais qui « nécessite l’approbation des deux parties », a expliqué, jeudi, le ministère des finances. « C’est dans les mains des Etats-Unis », avait déclaré, mardi, la présidente de la Confédération, Karin Keller-Sutter, dans un entretien avec la radio-télévision suisse (RTS).

Alors que Donald Trump avait menacé le Mexique de porter les droits de douane à 30 %, il a annoncé, jeudi, sur son réseau Truth Social, s’être mis d’accord avec son homologue mexicaine, Claudia Sheinbaum, pour prolonger de quatre-vingt-dix jours les taxes actuellement imposées aux produits mexicains. Cela revient à maintenir à 25 % les droits de douane sur les produits entrants aux Etats-Unis en dehors de l’accord de libre-échange Aceum, ainsi que les droits spécifiques sur l’automobile, l’acier et l’aluminium.
Le cuivre taxé à 50 % et fin de l’exemption sur les petits colis
Donald Trump a signé une « proclamation » amenant les droits de douane concernant le cuivre à 50 % à compter de vendredi, mais uniquement sur les produits fabriqués avec du cuivre, et pas le métal brut, ce qui rassure les professionnels du secteur. Cette mesure est destinée à favoriser la production américaine de ce métal, indispensable notamment aux équipements militaires et à la confection de nombreux biens de consommation.
La Maison Blanche a également annoncé, mercredi, la suppression de l’exemption de taxes sur les petits colis entrant aux Etats-Unis à compter du 29 août. Cette exemption permettait jusqu’ici d’envoyer par colis postal des biens d’une valeur inférieure à 800 dollars sans avoir à payer de surtaxe lors de leur entrée sur le sol américain. Les petits colis seront ainsi taxés au même niveau que les autres produits provenant du pays d’origine, ou avec un taux spécifique selon le type du produit et son origine.
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