« Elsa », d’Angela Bubba, traduit de l’italien par Florence Courriol-Seita, éd. Héloïse d’Ormesson, 416 p., 23 €, numérique 9 €.
En italien, « elsa » désigne la garde de l’épée. D’où l’expression stare con la mano sull’elsa qui, au figuré, signifie « être prêt au combat ». De ce point de vue, l’écrivaine Elsa Morante (1912-1985) portait bien son prénom. Prête au combat, elle l’aura été toute sa vie. Elle aura dû tout d’abord surmonter une interrogation lancinante liée à ses origines : son père était-il celui dont elle portait le nom ou un employé des postes sicilien amant de sa mère ? Il lui aura fallu ensuite composer avec les séquelles psychologiques laissées par un avortement précoce, puis lutter pour s’imposer comme écrivaine, exister hors de l’ombre écrasante de son mari, le romancier Alberto Moravia (1907-1990). A Rome, dans les années 1940, elle aura dû affronter le fascisme, se résoudre à quitter la ville en apprenant que le nom de Moravia figurait sur une liste noire de Mussolini… Et tout cela sans compter les batailles les plus âpres, celles qui, dans le même temps, se livraient à l’intérieur d’elle-même.
Ce sont tous ces combats que retrace l’écrivaine et chercheuse en littérature italienne Angela Bubba dans Elsa. Comme elle le note dans ses remerciements, cela fait près d’une dizaine d’années qu’elle se meut dans « ce labyrinthe spectaculaire que sont la vie et l’œuvre d’Elsa Morante ». Après Elsa Morante, madre et fanciullo (« Elsa Morante, mère et enfant », 2016, non traduit), elle se propose d’explorer ici les profondeurs de la psychologie morantienne. Non pas à travers une biographie classique – on se dirigera pour cela vers l’ouvrage de référence de René de Cecatty, Elsa Morante. Une vie pour la littérature (Tallandier, 2018) – ni même une biographie romancée. Mais par le truchement d’un roman biographique, c’est-à-dire d’un ouvrage dont l’ambition assumée est d’approcher la vérité à travers l’illusion d’une fiction.
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