En ce 31 août, la salle de conférences de 250 places de la bibliothèque de la ville de Boumerdès, à 45 kilomètres à l’est d’Alger, est presque remplie. Une prouesse pour un samedi d’été, alors que l’humidité transforme les 29° affichés par le thermomètre en 37° ressentis dans cette ville côtière bordée de longues plages. Tous sont venus écouter Youcef Aouchiche, le candidat du Front des forces socialistes (FFS), présenter son programme pour la présidentielle du 7 septembre à laquelle il est candidat, face au président sortant Abdelmadjid Tebboune.
Une fois leurs caméras fixées sur la scène, une demi-douzaine de cameramen s’écroulent sur leur siège, le nez sur leur téléphone. M. Aouchiche arrive discrètement, sans soulever d’applaudissements immédiats. Face à une dizaine de micros de médias nationaux, il déroule son programme économique et social avec beaucoup d’énergie. L’arabe classique n’est pas sa langue et il s’arrête parfois au milieu d’une phrase pour jeter un œil sur son texte, préférant la darija, le dialecte algérien, ou glissant quelques mots en kabyle et en français.
En lice face aux islamistes du Mouvement de la société pour la paix (MSP) et aux socialistes du FFS, deux partis disposant d’une solide assise nationale, Abdelmadjid Tebboune s’offre, sur le papier, une plus grande adversité qu’en 2019, lorsqu’il avait été élu face à Abdelkader Bengrina (17,3 %), le président du parti islamiste El Binaa – qui s’est depuis rallié au président sortant. Parmi les observateurs de la scène politique algérienne, beaucoup se demandent pourquoi le FFS, qui a toujours refusé de se compromettre dans des scrutins « joués d’avance », a accepté de participer – et donc de donner une forme de caution – à une élection présidentielle promise au chef de l’Etat.
Résister à la « démission » des électeurs
À en croire Youcef Aouchiche, interrogé sur le sujet dès l’annonce de la participation de son parti, le 25 mai, cette décision est moins liée à une amélioration démocratique qu’au risque qu’un boycott ferait peser sur l’Algérie. « Aujourd’hui, l’Algérien a démissionné de l’action politique, a-t-il expliqué. Nous sommes passés de la défiance à la démission, ce qui est un danger. En dépit des conditions contestables dans lesquelles elle se déroulera, la prochaine élection […] offre une opportunité pour la reconquête des espaces politiques démocratiques. » A ses yeux, le FFS est en capacité de faire « émerger un puissant pôle politique patriotique, progressiste et démocratique », à même de « réhabiliter les libertés d’expression et d’opinion ». Bien que la campagne ait été relativement consensuelle, M. Aouchiche a régulièrement appelé à la libération des détenus d’opinion, qui n’existent pas selon le président Tebboune.
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