Mouarrajat, hameau de Cisjordanie où soixante-quinze familles bédouines vivaient et veillaient sur leurs moutons depuis des décennies, n’est plus qu’une localité fantôme. Dimanche 20 juillet, au pied d’une montagne aride de la vallée du Jourdain, le soleil éclaire de sa lumière crue les enclos vides, les maisons à l’abandon et la mosquée, silencieuse et bosselée. « Les colons l’ont brûlée », soupire Souleiman Mleihat, 34 ans, qui observe l’endroit où sa famille a vécu pendant quarante-cinq ans depuis une colline, 7 kilomètres plus loin. Comme vingt-cinq autres familles restées sur place jusqu’au dernier moment, le chef de la communauté a été contraint de partir le 3 juillet.
En début de matinée ce jour-là, après des semaines de confrontations quotidiennes, une cinquantaine de « jeunes des collines », des colons juifs extrémistes et violents, armés de fusils d’assaut M-16 pour certains, se sont introduits dans le village. Selon le trentenaire, les assaillants ont « renversé » plusieurs moutons avec leurs véhicules tout-terrain, avant d’en voler une soixantaine. Pour humilier les locaux, certains d’entre eux ont aussi uriné à l’entrée des habitations bédouines avant de sommer leurs occupants de quitter les lieux ou d’être « tués ».
Les derniers irréductibles ont préféré partir, en emportant seulement des documents d’identité, un peu d’argent liquide et quelques rares meubles facilement transportables. Depuis ce jour, personne n’a pu retourner sur place pour récupérer le reste de ses biens. Tous ceux qui ont tenté de revenir ont été visés par les tirs des colons, postés sur les hauteurs et à l’intérieur du village.
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