« Assez de l’autoritarisme ! » : des dizaines de milliers de personnes ont manifesté en Hongrie, dimanche 18 mai, contre un nouveau projet de loi mettant en danger les ONG et les médias accusés de « menacer la souveraineté du pays ». « Je veux vivre dans une Hongrie libre, pas dans une dictature », pouvait-on lire sur une banderole déployée devant le Parlement, aux côtés de drapeaux hongrois, européens et arc-en-ciel.
« Cette loi est truffée d’absurdités, elle ne contient rien de concret. Tout comme en Russie, on pourra désormais être accusé d’avoir critiqué l’Etat et être traité d’agent de l’étranger », a déploré Gabor, un étudiant de 25 ans qui a préféré taire son nom de famille.
Le premier ministre nationaliste, Viktor Orban, qui avait promis en mars « un grand nettoyage de Pâques » contre ses rivaux, qualifiés de « punaises », a mis sa menace à exécution. Après le vote d’une série d’amendements constitutionnels restreignant les droits des personnes LGBT + et des binationaux, le parti au pouvoir a déposé, en début de semaine, au Parlement, un texte sur « la transparence de la vie publique ».
Plus de 300 ONG et médias, parmi lesquels Amnesty et Transparency International, ont signé une lettre commune dénonçant une manœuvre « autoritaire pour rester au pouvoir », à un an d’élections législatives qui s’annoncent serrées. Il s’agit de « faire taire toutes les voix critiques et d’éliminer ce qui reste de la démocratie hongroise », ont-ils estimé, sur le modèle de ce qui se passe « en Russie ». Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a appelé les dirigeants de l’Union européenne à « condamner sans équivoque » cette législation, qui devrait être avalisée par les députés le mois prochain.
« Poutinisation de la Hongrie »
L’opposition a aussi dénoncé une « poutinisation » de la Hongrie. « Le premier ministre a manifestement beaucoup appris de son mentor », le président russe, Vladimir Poutine, a réagi Peter Magyar, dont le parti conservateur Tisza est bien placé dans les sondages.
Viktor Orban a défendu, dimanche, devant des militants de son parti, ce texte qui vise, selon le gouvernement, à démanteler « des réseaux de propagande » financés par des fonds étrangers. « Oui au débat politique, oui à la liberté d’expression, non à l’argent étranger », a-t-il déclaré.
En vertu de la loi, les organisations « violant ou critiquant » les valeurs inscrites dans la Constitution, notamment « la primauté du mariage, de la famille et des sexes biologiques », pourront être placées sur une liste noire, après recommandation de l’Autorité de souveraineté établie l’an dernier.
Dans ce cas, elles devront demander l’autorisation de l’organe antiblanchiment pour recevoir des fonds de l’étranger. Leurs comptes en banque seront placés sous surveillance et les transferts de donateurs, bloqués s’il s’avère que l’objectif de cet argent est d’« influer sur la vie publique ». Si ces règles étaient enfreintes, de lourdes amendes seraient infligées, pouvant atteindre vingt-cinq fois le montant de l’aide financière reçue, avec menace d’interdiction des activités en cas de récidive.