Une juridiction spéciale a demandé au Parlement italien l’autorisation de renvoyer en justice deux ministres et un haut responsable pour la libération par Rome d’un Libyen soupçonné de crimes de guerre et recherché par la Cour pénale internationale (CPI), indique la presse mercredi 6 août.
Les ministres de la justice, Carlo Nordio, et de l’intérieur, Matteo Piantedosi, ainsi que le sous-secrétaire d’Etat à la présidence Alfredo Mantovano, chargé des services de renseignement, sont soupçonnés par le tribunal des ministres, un organe judiciaire chargé des affaires concernant les membres du gouvernement, d’avoir facilité la libération du Libyen et son renvoi à Tripoli. La Chambre des députés, qui devra se prononcer sur cette requête, est largement dominée par la majorité ultraconservatrice au pouvoir et devrait donc a priori rejeter la demande du tribunal.
Osama Almasri Najim, chef de la police judiciaire libyenne, fait l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis depuis le 15 février 2015. Il avait été arrêté en janvier dans un hôtel de Turin en vertu de ce mandat, puis libéré deux jours plus tard sur ordre de la cour d’appel de Rome pour vice de procédure, et immédiatement expulsé vers Tripoli à bord d’un avion affrété par l’Etat italien.
Carlo Nordio est soupçonné de ne pas avoir fait son devoir et d’avoir attendu la décision de la cour d’appel de Rome, alors qu’il était au courant de l’arrestation du Libyen et qu’il aurait pu intervenir pour le maintenir en prison. En février, il avait justifié sa décision en affirmant que le mandat d’arrêt de la CPI était truffé « d’imprécisions, d’omissions, d’incohérences et de conclusions contradictoires ». La décision de Matteo Piantedosi de signer son expulsion et celle d’Alfredo Mantovano d’utiliser un vol d’Etat pour le rapatrier ont permis à Osama Almasri Najim d’éviter l’arrestation en vertu du mandat de la CPI.
Giorgia Meloni, la cheffe du gouvernement ultraconservateur, elle aussi visée par cette enquête, a été mise hors de cause, lundi, par le tribunal, qui a considéré qu’elle n’a « pas été informée » en amont et qu’elle n’a donc pas partagé « la décision prise » d’expulser le responsable libyen. Revendiquant la collégialité des décisions, Mme Meloni a qualifié d’« absurde » l’idée que les deux ministres et le haut responsable aient pu prendre cette décision sans la consulter et assuré que le principal objectif du gouvernement est d’assurer la sécurité des citoyens.