Sur les grilles de l’hôpital Riuniti de Foggia, dans les Pouilles, une banderole a été tendue avec ces mots : « Je prends soin de toi mais je ne suis pas en sécurité. » Près de 500 personnes, la plupart en blouse blanche, se sont rassemblées lundi 16 septembre pour exprimer leur ras-le-bol. Une estrade a été posée sur un carré de pelouse et derrière le micro, médecins, infirmières et syndicalistes se succèdent. C’est ici, dans ce centre hospitalier le plus important de la région, que dans la soirée du 4 septembre, une énième agression a visé le personnel médical.
Une cinquantaine de personnes ont assiégé le service de chirurgie thoracique, molesté des médecins et roué de coups des infirmières après le décès, quelques heures plus tôt, d’une jeune femme de 23 ans. Devenue virale, la vidéo de l’agression montre les médecins se barricader dans un bureau pour appeler la police.
Dix jours plus tard, une histoire similaire s’est produite à l’hôpital de Pescara, dans les Abbruzes, à l’est du pays. En moins d’une semaine, d’autres cas d’agression ont été recensés à Turin, Vibo Valentia en Calabre ou encore à Campobasso dans la région du Molise, au sud.
Toutes ces histoires résument le malaise grandissant du corps médical dans la péninsule. « On est dans une situation dramatique, les violences sont devenues quotidiennes », explique Pierino di Silverio, secrétaire général d’Anaao-Assomed, l’un des principaux syndicats de médecins d’Italie. « On est venus apporter de la force aux collègues », précise ce chirurgien qui a fait le trajet depuis Naples pour l’occasion.
16 000 cas d’agression en 2023
Si les agressions ne sont pas nouvelles, comment en est-on arrivé là ? « Cela fait quinze ans que l’on coupe dans le budget de la santé, répond Pierino di Silverio. Les patients deviennent violents car ils se retrouvent face à une carence de soins et des listes d’attente interminables. » Dans la plupart des témoignages, le même constat d’injustice revient souvent, où le corps médical est tenu responsable des dysfonctionnements de l’hôpital public.
Les médecins relèvent aussi avec inquiétude une tendance qui s’est accélérée avec le Covid-19, celle qu’ils appellent « docteur Google » : la propension à chercher en ligne des réponses toutes faites pour soigner des pathologies et à privilégier l’automédication. « Avec Internet, chacun pense avoir droit à une intervention au même titre que d’autres patients, mais le cadre clinique varie d’une personne à l’autre, les gens ne se rendent plus compte », se désole Adda di Fiorra, qui travaille depuis dix ans à l’hôpital de Foggia. Si elle n’a subi aucun dommage physique, cette anesthésiste a été agressée verbalement plusieurs fois ces derniers mois.
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