Des hommes à Mobylette vont et viennent devant une maison en pierres blanches de Maan (Syrie), intrigués par la présence d’un convoi de la sûreté générale. En quelques minutes, ce 20 juillet, la nouvelle fait le tour de ce village situé au cœur des champs de pistachiers au nord-est de Hama. Le propriétaire de la bâtisse, Alaa Ibrahim, un alaouite de 47 ans déplacé à Homs, s’est présenté sans prévenir. Hassan Al-Hussein, le fermier sunnite qui occupe sa maison depuis la chute de l’ancien dictateur Bachar Al-Assad, le 8 décembre 2024, tente de faire bonne figure et de l’accueillir comme il se doit. Sa mère éclate en sanglots et exhorte Alaa Ibrahim à partir, effrayée par l’attroupement qui se forme devant la maison.
Un villageois sunnite, vêtu d’une dichdacha et d’un keffieh rouge, fonce vers le grand gaillard bodybuildé, menaçant. « On a enterré mon père hier. On a retrouvé son corps dans un puits, et tu oses te présenter aujourd’hui ? », l’invective-t-il. A ses yeux, les alaouites, restés avec le régime Al-Assad durant la guerre civile, portent une responsabilité collective dans le meurtre de son père, il y a treize ans, par des milices pro-Assad. Un autre villageois sunnite, Anwar Bakkour, s’interpose. Protégeant Alaa Ibrahim des autres, qu’il sait armés, il le sermonne, agacé : « Pourquoi es-tu venu ? Je t’ai dit que c’était dangereux. Tu veux faire des problèmes ? » Alaa Ibrahim remonte dans sa voiture, qui démarre en trombe, laissant sur place les policiers, totalement dépassés par l’incident.
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