Mardi 18 novembre s’est ouvert en Syrie le procès de plusieurs personnes accusées d’avoir commis des massacres, sur la côte syrienne, contre des populations alaouites. Pourtant, il ne s’agit que d’une mise en scène : le juge comme la défense sont impliqués dans les massacres et ne sont garants ni de l’impartialité de la justice ni de son indépendance. Ce procès manque autant de transparence que de probité, et nous ne nous laisserons pas abuser.
Je suis rentrée en Syrie après la chute du régime dirigé par le président Bachar Al-Assad, après un exil de plus de treize ans. Quelle fut ma déception de découvrir que l’armée constituée par le nouveau pouvoir en place n’était en réalité composée que de milices islamistes opérant en roue libre. La rumeur avait couru que les alaouites [obédience minoritaire de l’islam à laquelle appartient Bachar Al-Assad] s’étaient insurgés contre le nouveau pouvoir. Pourtant, lorsque je me suis retrouvée entre les villes de Jablé et de Lattaquié, le long du littoral, les nombreux alaouites que j’ai rencontrés m’ont tous expliqué n’aspirer qu’à vivre en paix et en sécurité.
Beaucoup d’entre eux, démunis, résident dans leur village, d’autres appartiennent aux classes moyennes urbaines : « A présent, m’ont-ils confié, il faut démarrer une nouvelle étape. C’est vrai que ces milices ont fait des incursions dans nos villages et dans nos villes, mais elles nous ont laissés tranquilles, et nous ne voulons rien d’autre que vivre pacifiquement et en coopération avec le nouvel Etat. » Parallèlement, des opérations de vendetta, menées par des individus et non par le nouveau régime, ont commencé à se produire dans les zones habitées par les alaouites : licenciements sans préavis, humiliations quotidiennes, jusqu’aux kidnappings et aux meurtres.
A la merci des milices islamistes
Tout cela a d’abord été mis sur le compte d’errements individuels. Au lieu de commencer un véritable transfert de pouvoir, de mettre en œuvre une justice de transition et de sanctionner ceux qui s’étaient rendus coupables de crimes de guerre au cours des années Al-Assad, le nouveau pouvoir a collaboré avec les sbires de l’ancien régime, à savoir les membres de gangs et les auteurs de massacres, tous bien identifiés. Cette collusion a progressivement dessiné les contours d’une image idéalisée destinée à la communauté occidentale, au détriment du peuple syrien, laissé à la merci des milices islamistes. Dans le même temps, le pays était dirigé selon un système clanique prompt aux règlements de comptes.
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