PRIME VIDEO – À LA DEMANDE – DOCUMENTAIRE
Ovni, hybride, délire potache : le nouveau « mockumentaire » – de l’anglais mockumentary, « documentaire parodique » – de Clément Cotentin a tout pour déstabiliser. Rien à voir, en effet, avec l’inégalable Montre jamais ça à personne, la série documentaire du même « Clem » retraçant l’ascension de son frère, Aurélien, devenu Orelsan. Si ce n’est la mise en scène « à la manière de », qui alterne confidences face caméra, séquences furtives en coulisses et extraits de concerts d’Orelsan, rejoint sur scène par un certain Fucking Fred – personnage créé par le comédien et humoriste Jonathan Cohen.
L’avertissement d’introduction – « Les scènes sont totalement vraies mais aussi totalement fausses » – oblige à un rapide retour en arrière. Ce qui est vrai, c’est que Jonathan Cohen a rencontré Orelsan en s’incrustant (déjà) sur son canapé, entre lui et son alter ego Gringe, lors d’un épisode de Bloqués – série de format court créée sur Canal+, dans la foulée de Bref, en 2013. Depuis, c’est le délire assuré à toutes les retrouvailles entre « Jo » et « Orel ».
Comme en 2019, lors de la tournée de son album La fête est finie (2017), quand le rappeur normand a proposé à Jonathan Cohen de le rejoindre sur scène. C’est à cette occasion qu’entre deux improbables suggestions (comme chanter en langage des signes) va naître le personnage de Fucking Fred et, dans la foulée, son refrain iconique : « Bonjour Paris, bienvenue dans mon cul. »
Nous sommes toujours dans le vrai, quand, au printemps 2022, Fucking Fred déboule un soir sur scène au côté d’Orelsan, qui enchaîne alors cinq soirées à l’AccorHotels Arena de Paris. Puis, en juin 2023, alors que le Vibiscum Festival à Vevey (Suisse) donne sa « carte blanche » à Orelsan, ce dernier doit trouver un chanteur en urgence. Ce sera Fucking Fred, mais cette fois non plus pour une chanson mais pour dix-huit minutes de scène en solo. Ce qui ne s’invente pas, ne s’improvise pas non plus, et laisse le champ libre à Jonathan Cohen.
Saucisses jetées au public
Le spectateur notera les apparitions discrètes des autres membres de l’équipe : le musicien et « backeur » (premier soutien vocal en rap) Ablaye, le musicien Eddie Purple, les beatmakers (concepteurs rythmiques) Phazz et Skread, pas totalement convaincus de la nécessité de jeter des saucisses au public, malgré les justifications imparables de Jonathan Cohen : « Merguez, en arabe, cela veut dire “don de soi”, sous forme de saucisse. »

Les amoureux des animaux remarqueront, eux, que seul le guépard – et non le léopard – a comme deux marques noires qui partent de chaque œil, le long de la tête, telles deux larmes. Broutille : Jonathan Cohen n’a « pas de limites », le répète à l’envi, et en fait ici une démonstration éclatante.
Une fois encore, après, entre autres, Enorme (2020), de Sophie Letourneur, avec Marina Foïs, qu’il force à avoir un enfant ; Une année difficile (2023), d’Olivier Nakache et Eric Toledano, dans lequel il forme un duo délirant avec Pio Marmaï ; ou Bref.2, de retour mi-février sur Disney+, où apparaissent également Orelsan et Gringe.
Après, même les meilleurs peuvent douter : « Est-ce que c’est une bonne idée, Fucking Fred ? », se demande Jonathan Cohen. Chanter « Je ne suis qu’un little trou de balle », affublé de nattes, d’un bandeau et d’un pantalon léopard, est-ce drôle ? A en croire la réaction du public : oui.
F*ckin’ Fred. Comme un léopard, documentaire de Clément Cotentin (Fr., 2025, 52 min). Avec Orelsan et Jonathan Cohen. Disponible à la demande sur Prime Video.