Les retraités doivent-ils être mis à contribution pour redresser des comptes publics en pleine dérive ? En annonçant un gel pour six mois des pensions de retraite, le premier ministre, Michel Barnier, a provoqué une levée de boucliers. Cette mesure, une des plus marquantes du budget pour 2025, doit rapporter à elle seule 3,6 milliards d’euros. Elle revient donc à « voler à nos aînés des milliards d’euros de pouvoir d’achat », juge Marine Le Pen, cheffe de file du Rassemblement national. Ce n’est pas « aux retraités de payer pour tous les cadeaux fiscaux qui ont été faits aux plus riches », estime, lui aussi, Eric Coquerel, député « insoumis » de Seine-Saint-Denis et président de la commission des finances à l’Assemblée.
Dans une note publiée lundi 14 octobre, le conseil des prélèvements obligatoires (CPO), institution associée à la Cour des comptes, apporte un éclairage différent. Taxer davantage les retraités fait partie de ses principales recommandations pour « conforter l’égalité des citoyens devant l’imposition des revenus ». Au cœur du dispositif fiscal, « les salaires sont soumis à des taux d’imposition cumulés fortement progressifs, de 15 % à 61 % », ce qui correspond à la logique de correction des inégalités, relève le CPO. En revanche, la fiscalité sur d’autres types de revenus, comme les retraites, paraît moins juste, en raison d’une série d’exonérations et d’abattements.
Dans le viseur du CPO, l’abattement de 10 % sur les pensions de retraites, qui réduit d’autant les sommes soumises à l’impôt sur le revenu. Cet avantage institué en 1977 peut dépasser 1 850 euros par an d’économie d’impôt, pour un coût global de 4,6 milliards d’euros. Or il bénéficie en quasi-totalité à la moitié des foyers fiscaux qui perçoivent les revenus les plus élevés, relèvent les experts du CPO. Cette mesure se révèle donc « trop générale et mal ciblée » compte tenu de l’hétérogénéité des situations et « de l’amélioration constante du niveau de vie » des retraités par rapport aux plus jeunes, argumente la note.
Réforme structurelle
Plutôt qu’un gel temporaire et un peu aveugle de toutes les pensions, le conseil des prélèvements obligatoires recommande une réforme structurelle. Elle consisterait à simplifier le dispositif, en remplaçant les divers avantages actuels par un « mécanisme unique qui pourrait être recentré sur les foyers modestes et intermédiaires ». Limiter les abattements aux petits revenus et réintroduire une contribution sociale généralisée au taux normal de 9,2 % sur les pensions les plus élevées pourrait rapporter jusqu’à 1,8 milliard d’euros par an, de façon pérenne.
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