On croyait tout savoir de Galilée, astronome génial et expérimentateur hors pair, qui fut victime de l’intolérance de l’Eglise face à la science nouvelle, selon une légende noire forgée en partie au XIXe siècle. Pourtant, du Galilée atomiste et hérétique des années 1980 au Galilée habile courtisan des années 1990, les études galiléennes n’ont cessé d’interroger l’exemplarité du savant florentin, en se concentrant sur son procès ou en se plongeant dans sa formation pour souligner sa proximité avec ses accusateurs jésuites. La dernière décennie a vu s’élargir l’observation.
Ainsi, dans Galilée et ses publics (Presses universitaires de Strasbourg, 2022), Mario Biagioli, dont on déplore la mort récente, ne fait pas une étude sur les instruments de Galilée, mais retrace ses déplacements entre différents lieux – de Padoue à Florence, puis à Rome – et soutient que ces déplacements étaient conditionnés par des opportunités différentes. A Padoue, par exemple, Galilée opérait dans une économie artisanale dans laquelle il recevait un crédit monétaire pour la vente de marchandises, comme sa boussole géométrique et militaire. Avec la publication de Sidereus nuncius (Le Messager des étoiles, 1610), Galilée entre dans l’économie de l’impression et des découvertes liées à son télescope. Selon l’auteur, Galilée joue sur différents plans, oscillant entre la culture du secret des pratiques artisanales, d’un côté, et les performances de la culture curiale, de l’autre.
Plus récemment encore, les chercheurs ont décentré leur regard du savant entrepreneur vers son réseau intellectuel, en explorant d’autres lieux dans sa correspondance. Hannah Marcus, professeure à Harvard [Massachusetts], et Paula Findlen, à Stanford [Californie], étudient la place de Rome dans le travail scientifique de Galilée. Grâce à une analyse des métadonnées des lettres de Galilée qui sont arrivées jusqu’à nous, elles discutent de la manière dont il a utilisé la correspondance pour construire un réseau romain autour des membres de l’Académie des Lynx, puis de quelques relations soigneusement entretenues avec d’importants ecclésiastiques, et de l’expertise de diplomates toscans bien placés dans la Ville éternelle.
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