L’informaticien Gilles Dowek est mort d’un cancer, à l’âge de 58 ans, lundi 21 juillet, à Paris. Chercheur à l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria), professeur attaché à l’ENS Paris-Saclay et ancien enseignant à l’Ecole polytechnique, il a marqué sa discipline sur le plan de la recherche mais aussi sur des aspects moins fréquents, comme l’éthique, la vulgarisation ou l’enseignement.
Il décrivait, dans Le Monde en 2017, son riche parcours comme une succession de hasards. Celui qui le mène à l’informatique est un concours européen pour les jeunes programmeurs dans lequel il arrive en finale à moins de 16 ans. Cela lui ouvre les portes d’un stage auprès de Gérard Huet, qui deviendra quelques années plus tard son directeur de thèse, après l’entrée à Polytechnique, en 1985.
Son directeur est un spécialiste de la vérification de preuves, c’est-à-dire des systèmes informatiques capables de débusquer des erreurs de programmation et surtout de certifier, notamment pour les logiciels les plus critiques, qu’ils répondront correctement aux demandes. Cela passe par la formalisation rigoureuse des processus de calculs et mobilise des capacités en logique et en langage informatique que Gilles Dowek développera toute sa carrière. Son dernier projet, Dedukti, a pour ambition d’unifier les divers systèmes de preuves existant. Cette thématique raisonne aujourd’hui avec de nombreux projets en intelligence artificielle qui tentent d’assister les mathématiciens non seulement dans la vérification de leurs démonstrations mais aussi dans leur élaboration. En 2023, son œuvre est récompensée du prix Inria-Académie de sciences.
Talents de conteur
Ses travaux l’ont conduit à méditer sur sa discipline en se demandant par exemple si le monde et la nature sont simulables par des ordinateurs, ou si le raisonnement mathématique est « mécanisable ». En 2007, il publie un essai de vulgarisation et de réflexion sur ce thème, Les Métamorphoses du calcul (Le Pommier), qui recevra le Grand prix de philosophie de l’Académie des sciences, la même année. « Gilles était l’un des meilleurs informaticiens français, mais aussi un grand penseur », salue son ami Serge Abiteboul, également chercheur à l’Inria, avec qui il a coécrit notamment, Le Temps des algorithmes (Le Pommier), en 2016.
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