Tbilissi vit toujours à l’heure des élections législatives. Loin d’apporter une réponse claire, le scrutin du 26 octobre a accouché d’une nouvelle crise politique. Le long des avenues de la capitale géorgienne, les immenses affiches électorales de Rêve géorgien sont toujours présentes. Après un recomptage partiel des voix – l’Union européenne (UE) et les États-Unis, notamment, ont émis des doutes sur la régularité du scrutin –, le parti pro-russe au pouvoir depuis 2012 a officiellement revendiqué la victoire avec 54 % des voix le 31 octobre ; mais celle-ci reste vivement contestée par l’opposition et la société civile.
Le nombre 41, numéro de la liste de Rêve géorgien, est omniprésent sur les posters. « Malheureusement, c’est aussi mon âge, je déteste ce chiffre », glisse l’avocat Guiorgui Mchvenieradze en conduisant sa voiture. Coincé dans les bouchons, il consulte régulièrement son smartphone pour suivre les derniers développements de la crise qui ébranle la nation caucasienne de 3,7 millions d’habitants.
« J’ai toujours un sac avec des affaires dans le coffre. On peut à tout moment m’appeler dans une autre ville pour ma casquette d’avocat ou pour soutenir des activistes », raconte ce spécialiste des droits de l’homme qui a fondé, en 2022, Democracy Defenders. Cette ONG lutte contre la désinformation russe et forme des jeunes à l’action non violente : « Travailler comme avocat n’était plus suffisant, il me fallait faire autre chose, car notre démocratie doit être défendue. Après les législatives de 2020, le gouvernement a radicalement changé sa rhétorique, mais aussi son orientation politique et géopolitique. »
Democracy Defenders appartient à la coalition de la société civile MyVote (regroupant 29 organisations), qui a joué un rôle clé dans l’observation des élections, puis dans la collecte et la diffusion des preuves de fraude.
Un mois en prison
Guiorgui Mchvenieradze était déjà observateur électoral, en 2003. Il a même passé un mois en prison pour avoir dénoncé des fraudes dans la région d’Adjarie, alors contrôlée par le cacique local Aslan Abachidze. « À l’époque, le principal problème était les listes incomplètes. Cette année, nous sommes confrontés au vote multiple, à des pressions sur les électeurs et, surtout, au manque de confidentialité du vote », explique-t-il. Voilà deux décennies, les manifestants avaient finalement obtenu gain de cause, entraînant, lors de la « révolution des roses », la chute du régime corrompu d’Édouard Chevardnadze. Aujourd’hui, l’issue du bras de fer est plus incertaine.
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