La Corée du Sud, dont le système constitutionnel possède des caractéristiques « semi-présidentielles » (exécutif bicéphale avec un président élu au suffrage universel direct et un premier ministre nommé par lui avec la confiance de l’Assemblée), a récemment donné une leçon de démocratie dont la France devrait urgemment s’inspirer.
Le recours aux pleins pouvoirs, décidé à 22 h 30 par le président de Corée du Sud, Yoon Suk-yeol, dans la nuit au 3 au 4 décembre, en vertu de l’article 77 de la Constitution sud-coréenne, a été levé par l’Assemblée nationale dans un vote à la majorité survenu à peine quelques heures plus tard, alors que l’armée, qui essayait de bloquer l’accès au Parlement, se trouvait empêchée par des milliers de manifestants sortis spontanément dans la rue dans un incroyable sursaut démocratique.
Réagir vite
Dix jours plus tard, le président a été destitué par un vote des parlementaires, à la majorité qualifiée des deux tiers, y compris par des députés de son propre parti. Si cet impeachment doit encore être confirmé par la Cour constitutionnelle, Yoon est aussi poursuivi au pénal, et tout porte à croire qu’il sera condamné à une très lourde peine de prison, voire à la peine capitale pour sa tentative de coup d’Etat. L’une de ses prédécesseures, Park Geun-hye, avait été condamnée à vingt-deux ans d’emprisonnement après son impeachment, en l’espèce pour des faits de corruption.
Si cette tentative de coup d’Etat, permise par l’inscription de la loi martiale dans la Constitution, a ainsi pu être défaite, c’est parce que le texte en question, permettant une dictature temporaire, donne néanmoins à l’Assemblée les moyens de s’y opposer sans délai.
C’est davantage de garde-fous que notre article 16, qui offre au président une compétence discrétionnaire à la fois pour déclarer l’état d’exception mais également pour y mettre fin, sans qu’aucune autorité soit dotée par les textes de moyens de s’y opposer – ni l’Assemblée nationale ni même le Conseil constitutionnel, puisque seule est prévue la possibilité d’un « avis » (et non une décision) du Conseil, facultatif après trente jours, obligatoire après soixante jours. Or, comme l’ont bien compris les Sud-coréens, en matière de coup d’Etat, il faut réagir très vite : tout se joue dans les premières heures.
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