L’immigration est un thème politique condamné à subir la loi des séries : une loi est votée sur ce sujet en moyenne tous les deux ans, et chacune se bâtit sur le constat d’échec de la précédente, même lorsque ses effets n’ont pas encore pu se faire sentir. Dimanche 13 octobre, la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a confirmé sur BFM-TV qu’il y aurait une loi sur l’immigration « en début d’année 2025 ». La précédente a été promulguée le 26 janvier, soit il y a moins de neuf mois, et certains décrets d’application sont toujours attendus.
« Il faudra une nouvelle loi immigration », a déclaré Mme Bregeon, notamment pour porter à 210 jours (contre 90 jours aujourd’hui) la durée maximale de rétention des étrangers visés par une mesure d’éloignement. Une mesure mise sur la table par le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, après l’affaire Philippine, une étudiante tuée le 21 septembre. Le principal suspect du meurtre, un Marocain déjà condamné pour viol, avait été libéré d’un centre de rétention faute de perspective d’éloignement vers son pays.
« On ne s’interdit pas (…) d’y mettre d’autres dispositions (…) utiles pour protéger les Français », a ajouté Mme Bregeon. Depuis qu’il est arrivé place Beauvau, M. Retailleau a plusieurs fois dit son souhait de réintroduire des dispositions de la loi Darmanin censurées par le Conseil constitutionnel car considérées comme des cavaliers législatifs, c’est-à-dire sans lien direct avec le texte d’origine.
Un texte potentiellement avec des dispositions censurées
Lors des débats parlementaires, la droite sénatoriale – avec M. Retailleau, alors président du groupe Les Républicains, en chef de file – avait largement durci le projet de loi gouvernemental en y introduisant des dispositions telles que la fin de l’automaticité du droit du sol, la préférence nationale dans l’accès aux prestations sociales, le durcissement de l’accès au titre de séjour étudiant ou au regroupement familial ou encore le rétablissement du délit de séjour irrégulier.
Tout à sa volonté d’obtenir le vote de son texte, et au risque de diviser ses troupes, la Macronie avait scellé un accord avec LR et le gouvernement s’était accommodé d’une copie comportant des articles « clairement contraires à la Constitution », selon les termes de M. Darmanin à l’époque.
En l’espace de quelques mois, et d’une dissolution, la France est donc passée d’un exécutif demandant au Conseil constitutionnel de « nettoyer » un texte qui ne lui convient pas totalement à un exécutif qui vise à faire passer une nouvelle loi avec, potentiellement, les mêmes dispositions. Et qui, pour cela, argue que « la censure des juges s’est faite sur des critères de forme et non de fond », ainsi que l’a souligné Mme Bregeon. Si la porte-parole a évoqué des convergences possibles avec le chef de file de la droite à l’Assemblée nationale, Laurent Wauquiez, et celui des centristes au Sénat, Hervé Marseille, elle s’est gardée de mentionner le Rassemblement national, qui menace de déclencher une censure du gouvernement et qui, lors du vote de la loi Darmanin, avait déjà savouré sa « victoire idéologique ».