- En France, en 2025 et à la veille de la rentrée scolaire, plus de 2.000 enfants passent la nuit à la rue.
- L’Unicef France et la Fédération des acteurs de la solidarité tirent la sonnette d’alarme.
- Pour en savoir plus, TF1info a contacté Adeline Hazan, qui dirige l’agence onusienne.
Jamais le nombre d’enfants à la rue n’avait été aussi élevé à la veille d’une rentrée scolaire. C’est le tragique constat que met en lumière le dernier baromètre annuel « Enfants à la rue », qui a été dévoilé ce jeudi 28 août par la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) et de l’Unicef France. Au moins 2.159 enfants sont restés dans la nuit du 19 au 20 août sans solution d’hébergement à la suite de la demande de leur famille au 115, le numéro d’urgence pour les personnes sans abri. Face au manque de volonté, les deux organisations tirent la sonnette d’alarme. TF1info a contacté Adeline Hazan, présidente de l’Unicef France, pour en savoir plus.
Il y a un manque de volonté politique pour mettre fin à cette tragédie
Il y a un manque de volonté politique pour mettre fin à cette tragédie
Adeline Hazan
Que nous apprend le dernier décompte réalisé par votre organisation ?
Adeline Hazan : Le nombre d’enfants qui dorment dans la rue a augmenté de 6% par rapport à l’année dernière, alors que la situation était déjà critique. Les enfants sont de plus en plus jeunes : 503 enfants – sur 2.159 au total – avaient moins de trois ans. C’est absolument insupportable. D’autant que ce chiffre est de surcroît largement sous-évalué. Le baromètre ne prend pas en compte ceux qui ne connaissent pas le 115 ou qui ont renoncé à appeler, les enfants vivant dans des bidonvilles et en squats ou encore les mineurs non accompagnés.
Dans plus d’un cas sur trois, il s’agit de femmes seules avec enfant(s), un chiffre en hausse de 58% depuis 2022. Ce sont des femmes qui n’ont pas de logement et qui se retrouvent à la rue en sortant de la maternité ou qui ont quitté leur compagnon, parfois à la suite de violences, et qui passent quelques semaines voire quelques mois dans la rue avant qu’on leur trouve un foyer d’hébergement. Les régions les plus concernées sont l’Île-de-France, l’Auvergne-Rhône-Alpes et la région PACA.
Mais la situation est encore pire dans les territoires d’outre-mer, où le nombre de personnes mal logées est absolument effarant.
Le gouvernement s’était fixé l’objectif de zéro enfant dans la rue avant la fin de l’année 2022. On en est très loin…
Depuis 2022, le nombre d’enfants à la rue a augmenté de 30%. C’est une violation flagrante des principes de la Convention internationale des droits de l’enfant. Le logement est un droit inconditionnel de l’enfant, et il est bafoué. La France est un pays riche. Et, même s’il y a une crise politique et sociale, il est absolument scandaleux que des enfants vivent et meurent à la rue : 31 sont décédés en 2024, dont un bébé de 8 jours. C’est intolérable.
Depuis 2019, année où a commencé le décompte, le phénomène ne cesse de prendre de l’ampleur. Comment l’expliquer ?
Il y a un manque de volonté politique pour mettre fin à cette tragédie. Tous les crédits afférents à la solidarité et à l’inclusion diminuent de manière constante. D’ailleurs, ce qui est annoncé pour 2026, c’est une baisse de plus de 1,7 milliard d’euros. La pauvreté en France augmente de façon tragique, comme le montrent les derniers chiffres de l’Insee (nouvelle fenêtre). Le nombre d’expulsions locatives a énormément augmenté depuis 2024. Surtout, iI n’y a pas assez de logements sociaux pour les personnes en situation de grande précarité. Il faut attendre des années, et cela conduit à l’embolisation des centres d’hébergement.
Que réclamez-vous pour mettre un terme à cette tragédie silencieuse ?
Nous demandons la mise en œuvre d’une politique pluriannuelle de l’hébergement et du logement, de manière à garantir des conditions de vie dignes à tous les enfants et leurs parents. Nous demandons une augmentation du nombre de logements sociaux et de places d’hébergement. On a calculé qu’il fallait au moins 10.000 places supplémentaires. Au moins 43.600 enfants ne bénéficient pas d’un logement adapté, dont près de 30.000 enfants dorment à l’hôtel, dont près de 10.000 ont moins de 3 ans.