Usurper une plaque d’immatriculation est devenu très facile pour les escrocs.
Les fraudes se multiplient car la base de données est accessible sur Internet.
Les victimes reçoivent alors des amendes pour des infractions qu’elles n’ont jamais commises.
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Le 20H
Quand les automobilistes s’en aperçoivent, il est déjà trop tard. Ils sont de plus en plus nombreux à se faire usurper la plaque d’immatriculation de leur véhicule. Pour certains, c’est alors le début d’un long cauchemar, comme le montre la vidéo du JT de TF1 en tête de cet article.
Des escrocs qui agissent sur les réseaux sociaux
Les fraudes explosent depuis que toutes les démarches pour immatriculer une voiture se font en ligne. Avant 2017, il fallait se rendre en personne en préfecture. Désormais, pour obtenir de l’aide, il est possible de se rendre chez un garagiste ou un concessionnaire qui a accès à la base de données nationale en question. Ils sont alors autorisés à modifier directement les informations de leurs clients.
Nelson Teixeira, responsable conseil, achat et vente dans une agence de Seine-et-Marne, est justement en train de créer la carte grise d’une cliente. En moins de dix minutes, le professionnel crée une nouvelle immatriculation, un service facturé une trentaine d’euros. « On va saisir toutes les informations relatives au nouveau propriétaire : nom, prénom, adresse complète… » explique-t-il.
Mais cette base de données est parfois détournée pour proposer des services illégaux : « Une personne malintentionnée va pouvoir faire tout et n’importe quoi avec. Elle peut faire une immatriculation sans contrôle technique, elle peut immatriculer le véhicule sur une tierce personne même si ce n’est pas elle en face de lui. »
On voit bien qu’il y a une multitude de voitures et que vous ne pouvez pas être le propriétaire de toutes ces voitures.
On voit bien qu’il y a une multitude de voitures et que vous ne pouvez pas être le propriétaire de toutes ces voitures.
Me Olivier Bonnefond, avocat d’Igor, victime d’usurpation de plaque d’immatriculation
Sur les réseaux sociaux, des escrocs proposent de vous faire disparaître du registre. Le but : arrêter de payer des contraventions. Notre journaliste contacte l’un d’eux par téléphone. Il promet de s’occuper de tout, moyennant 150 euros : « Je vous envoie un RIB ou un PayPal ou un Paylib comme vous voulez. Il n’y a pas de souci. J’en ai fait plusieurs et ça marche bien. »
Un autre automobiliste sera alors désigné à son insu et verra son identité usurpée. C’est ce qui est arrivé à Igor. Depuis trois ans, il reçoit des milliers d’amendes à son domicile pour excès de vitesse, stationnement gênant ou encore délit de fuite. Après avoir additionné tous les montants, son avocat, Me Olivier Bonnefond, arrive à une somme exorbitante : « Le cabinet a déjà identifié plus de 500.000 euros d’amendes. Donc je pense qu’on va très facilement atteindre le million d’euros. On voit bien qu’il y a une multitude de voitures et que vous ne pouvez pas être le propriétaire de toutes ces voitures. »
Une entreprise au nom de la victime
Igor ne les a évidemment pas payées mais il se retrouve avec une dette colossale. « J’ai peur. J’ai peur parce que dans les PV que je reçois, c’est marqué qu’ils vont tirer sur mon compte. Je suis obligé d’enlever tout de suite l’argent qui rentre sur le compte », témoigne-t-il.
En réalité, tout a commencé quand un malfaiteur s’est procuré la pièce d’identité d’Igor pour créer une entreprise, puis il a réussi à obtenir l’autorisation pour entrer dans la base de données nationale. Il ne restait alors plus qu’à immatriculer des centaines de véhicules au nom de la société de sa victime. À l’adresse indiquée, ni locaux, ni salariés, ni voitures. En résumé, rien de ce qui ressemble à une entreprise.
Selon l’association 40 millions d’automobilistes, 22.000 plaintes ont été enregistrées en 2022 pour ce motif. Contacté, le ministère de l’Intérieur assure traquer ces escrocs, qui risquent sept ans de prison. Les contrôles devraient être prochainement durcis. En 2024, 10% des professionnels ont déjà perdu leur habilitation à cause d’une suspicion de fraude.