Professeur de journalisme à l’université de New York et spécialiste des médias, Jay Rosen est l’un des plus fins observateurs de la presse américaine. Dans un entretien au Monde, il revient sur la décision annoncée, le 26 février, par Jeff Bezos concernant le Washington Post, prestigieux titre dont il est propriétaire. Désormais, a décrété le milliardaire, les pages Opinions de ce quotidien publieront uniquement des tribunes pour la défense des « libertés individuelles » et des « marchés libres ».
Le 10 mars, une éditorialiste historique du journal, Ruth Marcus, a démissionné après le refus du directeur de la rédaction de publier une chronique critiquant la nouvelle politique du journal : une censure à laquelle elle ne s’était jamais heurtée à ce poste au Washington Post, a-t-elle dénoncé dans sa lettre de démission.
En octobre 2024, M. Bezos avait déjà interdit à la rédaction de publier un éditorial en soutien à la démocrate Kamala Harris, rompant avec la tradition voulant que le quotidien, avant chaque élection présidentielle, exprime un choix entre les deux candidats. Le patron d’Amazon prend ainsi le contrepied de ses engagements de 2013, lorsqu’il s’était porté acquéreur du journal. Jeff Bezos avait alors promis de se tenir loin de la rédaction, affirmant qu’il agissait par sens du « devoir civique ».
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