Malade, Jean-Paul Montanari n’avait pas pu participer, début avril, à la présentation de la prochaine édition du festival Montpellier Danse, dont il a signé, pour la dernière fois, la programmation. Celui qui fut l’emblématique directeur de l’événement pendant quarante-deux ans, est mort, vendredi 25 avril, à l’âge de 77 ans, quatre mois après avoir pris sa retraite.
« Jean-Paul Montanari nous a quittés. La danse perd son plus fidèle serviteur, la ville de Montpellier un homme qui lui a offert un rayonnement artistique mondial », a annoncé, dans un communiqué, le maire de la ville, Michaël Delafosse. « Jean-Paul Montanari a marqué l’histoire de la danse en France et en Europe », a souligné Rachida Dati, la ministre de la culture.
Sa mort intervient deux semaines après l’annonce de l’équipe appelée à prendre sa succession, composée notamment de l’ancienne dirigeante de la Maison de la danse de Lyon Dominique Hervieu et du chorégraphe israélien Hofesh Shechter.
Un rendez-vous devenu incontournable sous sa houlette
Né à Alger en 1947, Jean-Paul Montanari était arrivé avec ses parents à Lyon en 1962. Il avait eu un coup de foudre pour la danse en 1967 devant un ballet de Maurice Béjart à Avignon. Sa passion s’était renforcée plus tard en découvrant les spectacles des Américains Merce Cunningham et Trisha Brown.
Etudiant engagé en mai 1968, il avait fondé, en 1975, le Groupe de libération homosexuel de Lyon, puis il s’était engagé, une décennie plus tard, dans la lutte contre le VIH, a rappelé dans son communiqué Michaël Delafosse.
Sous sa houlette à partir de 1983, le festival Montpellier Danse, créé en 1981, est devenu l’un des rendez-vous les plus importants de la danse contemporaine en France, un art qui le fascinait.
« La danse contemporaine s’adresse à une part inconsciente de notre sensibilité. Il faut faire un effort pour aller vers elle », expliquait-il à l’Agence France-Presse (AFP) il y a une dizaine d’années. Et de souligner que « contrairement à la littérature, à la peinture ou la musique, elle ne se conserve pas. Elle n’a d’existence que dans l’esprit de ceux qui sont là (…). Chaque chorégraphe, créateur, invente son vocabulaire et raconte l’instant présent. Ensuite, ça disparaît ».
« Ce qu’on a appelé la “danse contemporaine”, depuis les années 1980, n’existe plus », regrettait-il néanmoins en 2024, lors d’un entretien au Monde. « Nous sommes revenus à quelque chose de beaucoup plus classique. (…) Aujourd’hui, 90 % des productions sont des spectacles de divertissement, avec la complicité de certains médias et des réseaux sociaux, ces poisons de l’époque. La danse qu’on peut appeler “savante” a tendance à se réduire », jugeait-il encore.
Il parcourait les continents à la recherche de créations inédites
Jean-Paul Montanari a toujours refusé de s’attribuer le succès du festival Montpellier Danse, estimant que les lauriers revenaient à l’initiateur, son compagnon, le chorégraphe et danseur Dominique Bagouet, mort du sida en 1992, et à l’ancien maire socialiste de Montpellier Georges Frêche. Mais c’est bien lui qui, pendant plus de quatre décennies, a parcouru les continents, de l’Afrique à l’Asie, avec dans son viseur des créations inédites et des chorégraphes innovants.
« Je suis un passeur, mais j’ai un don naturel et particulier pour tomber amoureux des artistes et de leur univers. Il suffit souvent de quelques minutes devant un spectacle pour que je sache immédiatement que je vais l’aimer. Je n’ai aucune hésitation et je ne me trompe presque jamais », expliquait-il encore au Monde en 2024. « Avec soixante mille spectateurs annuels aujourd’hui en moyenne pour le festival et la saison, je pense que je les ai souvent convaincus », relevait-il.
« Je suis là à vie, tel un vieux dictateur », disait-il déjà, en souriant, lors de l’édition 2008 du festival. La 45e édition de Montpellier Danse, qui se tiendra du 21 juin au 5 juillet, aura, elle, forcément le goût particulier de l’absence.