Huit ans après l’avoir quitté, John Dramani Mahama se prépare à revenir au pouvoir au Ghana. L’ancien chef de l’Etat (2012-2017) a largement remporté l’élection présidentielle du 7 décembre face à Mahamudu Bawumia, vice-président sortant et candidat du Nouveau Parti patriotique (NPP), avec 56,55 % des suffrages exprimés – soit six points de plus que lors de sa première élection, en 2012.
A 66 ans, le candidat du Congrès national démocratique (NDC) marche désormais dans les pas de la figure tutélaire de son parti, Jerry Rawlings, élu en 1992 après deux putschs en 1979 et 1981. Avec une différence majeure : John Dramani Mahama n’a jamais mené de coup d’Etat et est donc le premier président ghanéen à revenir au pouvoir par les urnes.
Sa carrière politique débute en 1996, avec son élection comme député dans sa région natale de Savannah (nord-ouest). Un temps ministre de la communication de Jerry Rawlings, il connaît sa première consécration nationale en 2008 après l’élection de John Atta Mills, qui le choisit comme vice-président. « Le NDC a vu en lui un candidat jeune et apprécié par une large partie de la population, analyse Franklin Cudjoe, fondateur et président du centre de réflexion ghanéen Imani. Il n’était pas le genre de politicien à se comporter de manière brute ou agressive, ce qui lui a permis d’obtenir le respect d’une bonne frange de la sphère politique. »
John Dramani Mahama a toujours baigné dans la politique. Son père, Emmanuel Adama Mahama, était membre du Parlement puis a été nommé administrateur de la région du Nord par Kwame Nkrumah, père de l’indépendance et figure du panafricanisme. La chute du premier président du Ghana, renversé en 1966 par un coup d’Etat, marquera l’esprit de John Dramani Mahama. Dans My First Coup d’Etat : Memories from the Lost Decades of Africa, ses mémoires publiées en 2012, il raconte notamment que « ce moment a marqué l’éveil de [sa] conscience » et « a changé [sa] vie et influencé tous les moments qui ont suivi ».
Scandales de corruption
Le 24 juillet 2012, il accède à la magistrature suprême après le décès de John Atta Mills. Moins de cinq mois plus tard, il est élu et confirmé dans ses fonctions. Il consacre alors son mandat à des investissements massifs, particulièrement dans le domaine de la santé. Mais sa présidence est aussi marquée par de nombreux scandales de corruption et traversée par l’une des pires crises énergétiques que le Ghana ait connues.
« Cette crise a eu de graves conséquences économiques et sociales, rappelle Lloyd Amoah, chercheur en sciences politiques à l’Université du Ghana. Résultat : le président a globalement été perçu comme moins compétent que ce qu’on attendait de lui. » Un désaveu populaire qui le conduira à perdre la présidentielle de 2016.
Selon Vladimir Antwi-Danso, spécialiste en relations internationales et responsable académique au Collège de commandement et d’état-major des forces armées ghanéennes, John Dramani Mahama a notamment fait preuve, lors de son premier mandat, de « pragmatisme en matière de politique étrangère ». Président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) de 2013 à 2015, « il entretenait, conformément à la tradition de non-alignement du Ghana, des liens forts avec les Occidentaux et le Commonwealth, mais aussi avec la Chine et la Russie ».
Ses relations avec la Russie ont récemment refait surface dans le débat public. Cinq mois avant la présidentielle du 7 décembre, l’ancien étudiant à l’Institut des sciences sociales de Moscou s’est rendu dans la capitale russe lors d’un voyage consacré à la réédition de ses mémoires. « Ce déplacement avait soulevé certaines craintes sur d’éventuelles tentatives d’influence étrangère sur le Ghana, souligne Vladimir Antwi-Danso. Mais cela est en partie injustifié. Lors de son premier mandat, il ne s’est pas plus rapproché de la Russie que ne l’avaient fait ses prédécesseurs. »