Il a fallu quarante jours pour que Kamala Harris accepte un exercice élémentaire, en campagne présidentielle : l’interview télévisée. Ce délai étonnant, depuis le retrait de Joe Biden en sa faveur, avait offert aux républicains une fenêtre de tir contre la candidate démocrate. Peut-on prétendre à la plus haute fonction si on fuit autant la contradiction ? La performance de Kamala Harris, jeudi 29 août, sur CNN, était donc attendue et scrutée. La chaîne affichait même un décompte permanent sur son antenne, dans la journée, comme si on attendait le décollage d’une mission spatiale à Cap Canaveral.
L’attente était excessive. Il n’y eut ni crash, ni feu d’artifice. Ce fut un exercice court – vingt-sept minutes interrompues par des coupures publicitaires et des images de campagne – sans faute majeure ni moment saillant. Le décor était étrange – une sorte de bureau impersonnel et gris – et le cadrage défavorable à Kamala Harris, qui paraissait tassée entre son colistier, Tim Walz, et la journaliste Dana Bash.
La candidate démocrate a parlé de façon posée, s’autorisant parfois un large sourire ou un rire, mais a manqué de formules cinglantes. Désireuse sans doute d’apparaître la plus présidentielle et maîtrisée possible, elle n’est pas parvenue à incarner l’énergie qui anime la campagne démocrate depuis la fin juillet. Mais le véritable test n’était pas jeudi sur CNN. Il aura lieu le 10 septembre, face à Donald Trump, lors de leur débat sur la chaîne ABC.
Hommage à Joe Biden
Sur le fond, Kamala Harris a appelé les électeurs à « tourner la page de la dernière décennie », qui a été contraire à « l’esprit de notre pays », mettant en cause l’ancien président pour avoir « divisé notre nation ». La seule question posée en politique étrangère a concerné la guerre à Gaza. Kamala Harris ne s’est pas prononcée en faveur d’un gel des livraisons d’armes à Israël. Elle a renouvelé son engagement en faveur de la défense de l’Etat hébreu et appelé de ses vœux une conclusion heureuse des négociations, en vue de la libération des otages encore vivants et d’un cessez-le-feu.
La candidate a aussi défendu vigoureusement le bilan de l’administration Biden, en soulignant que « l’économie s’était effondrée », avant leur arrivée à la Maison Blanche. Kamala Harris a exposé brièvement ses propres projets, comme le crédit d’impôt de 25 000 dollars pour les primo-acquéreurs d’un logement, « qui fait partie du rêve américain ». La vice-présidente a reconnu que « les prix sont trop élevés », tout en insistant sur la réduction de l’inflation à 3 %, les créations d’emplois dans l’industrie, la renégociation des prix des médicaments avec l’industrie pharmaceutique. Concernant la crise migratoire, elle a renvoyé la responsabilité sur Donald Trump, qu’elle a accusé d’avoir « tué » le texte négocié de façon bipartisane au Sénat, « qui aurait déployé 1 500 agents de plus sur la frontière » avec le Mexique.
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