Smartphones, tablettes, ordinateurs, écrans plats, batteries de vélo électriques, panneaux photovoltaïques… La numérisation et l’électrification de nos modes de vie s’accompagnent d’une explosion des déchets électroniques. Entre 2010 et 2022, ils ont bondi de 82 % pour atteindre le volume record de 62 millions de tonnes, à l’échelle de la planète, alerte l’Organisation des Nations unies (ONU), dans un rapport publié mercredi 20 mars.
Pour donner la mesure du péril, les deux organismes à l’origine de l’étude (l’Institut des Nations unies pour la formation et la recherche, Unitar, et l’Union internationale des télécommunications, UIT) ont été obligés de recourir aux comparaisons : il faudrait plus d’un million et demi de poids lourds de 40 tonnes chacun pour transporter cette montagne d’« e-déchets ». Et, selon les projections de l’ONU, elle va continuer à grossir de 32 % pour approcher 82 millions de tonnes, en 2030. Pire, entre 2022 et 2030, le taux de collecte et de recyclage devrait décliner de 22,3 % à 20 %. Si bien que les déchets électroniques croissent cinq fois plus vite que la quantité recyclée.
De fortes disparités existent, selon les zones géographiques et le niveau de développement des pays. En volume global, la Chine est de loin le premier producteur de déchets électroniques, avec un peu plus de 12 millions de tonnes générées, en 2022. Elle devance les Etats-Unis (7 millions de tonnes) et l’Inde (4 millions de tonnes).
Rapportée à la population, la hiérarchie est bouleversée. L’Europe domine le classement avec 17,6 kg par habitant et par an. Un Français en génère en moyenne 22,4 kg : moins qu’un Norvégien (26 kg), mais plus qu’un Américain (21,3 kg) et près du triple d’un Chinois (8,5 kg). Le Vieux Continent est également la zone du monde qui recycle le plus (42,8 %) et qui s’est fixé les objectifs les plus ambitieux. Depuis 2019, 85 % des déchets produits dans l’année doivent être collectés.
Seuls trois pays ont atteint cet objectif. Il s’agit de la Pologne (seul pays à avoir surpassé ce taux), de la Bulgarie et de la Croatie, trois Etats qui occupent rarement les premières places en matière d’exemplarité environnementale. Sans surprise, l’Afrique est le continent qui produit le moins de « e-déchets » (un Africain en génère 2,5 kg par an, soit sept fois moins qu’un Européen) et en recycle le moins (0,7 %).
Conséquences catastrophiques
« Alors que les panneaux solaires et les équipements électroniques sont utilisés avec beaucoup d’espoir pour lutter contre la crise climatique et favoriser le progrès numérique, l’explosion des déchets électroniques requiert une attention urgente », alerte Nikhil Seth, le directeur général de l’Unitar, qui appelle les Etats à lutter contre l’obsolescence programmée. En 2022, près de la moitié des 62 millions de tonnes d’« e-déchets » se sont retrouvées dans des décharges sauvages (14 millions de tonnes) ou ont alimenté le marché noir du recyclage dans les pays en développement (16 millions de tonnes).
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