« Crush ! » C’est le titre du dernier spot publicitaire d’Apple, présenté sur le réseau X par le PDG de l’entreprise, Tim Cook lui-même. Il mérite bien son appellation. Sur le plateau, un amoncellement en pyramide d’objets sympathiques : un piano, une guitare, une trompette, un buste, des pots de peinture, une chaîne stéréo, une télévision… Impitoyablement, la presse se referme lentement, écrasant un à un tous ces instruments dans une giclée de peinture multicolore. Quand la presse se rouvre, ne reste au milieu qu’une tablette iPad, le dernier modèle, presque invisible avec ses 5 millimètres d’épaisseur.
Voici la dernière interprétation de la destruction créatrice par l’entreprise la plus célèbre de la Silicon Valley. De la couleur et de la diversité foisonnante naît le noir extra-plat bourré d’intelligence artificielle (IA). Troublante vision qui apparaît comme le négatif de la publicité de 1984 vantant l’arrivée de l’ordinateur Macintosh. On y voyait une athlète toute en couleurs vives pulvériser à coups de masse un univers orwellien (avec son livre 1984, Secker and Warburg, 1949) monochrome et totalitaire.
La réaction a été immédiate, et négative, sur les réseaux. C’est « la destruction de l’expérience humaine grâce à la Silicon Valley », a réagi l’acteur britannique Hugh Grant. D’autres croient savoir que Steve Jobs lui-même aurait été choqué par cette version gore des capacités du numérique. Aussitôt, Tor Myhren, le vice-directeur du marketing d’Apple, a rétropédalé. « Notre objectif est de célébrer la myriade de façons dont les utilisateurs s’expriment et donnent vie à leurs idées grâce à l’iPad. Nous avons raté le coche avec cette vidéo et nous en sommes désolés », a-t-il assuré. Le spot ne sera pas diffusé sur les télévisions.
Situation délicate
Si l’objectif était de faire parler de son nouveau produit, c’est gagné. Le retentissement médiatique a été infiniment supérieur aux anticipations. Mais cela est apparu comme un signe d’arrogance insupportable.
On pourrait aussi interpréter cette publicité dans l’autre sens. Ne serait-elle pas, de façon subliminale, la métaphore d’un Apple qui craint de ne plus être l’acteur d’une nouvelle rupture technologique, mais sa victime ? La firme est aujourd’hui dans une situation délicate. Sur les six derniers trimestres, son chiffre d’affaires a régressé cinq fois de suite. Et dans le domaine des tablettes iPad, les ventes sont en baisse depuis plus de deux ans. La firme a été dépassée en capitalisation boursière par son rival de toujours, Microsoft, et les investisseurs s’inquiètent de son retard en matière d’IA.
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