Défaillances en matière de qualité d’accueil, fausses déclarations, anomalies financières, refus de coopérer : l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) épingle la gestion du groupe de crèches privées La Maison bleue dans un rapport publié lundi 16 juin.
Le groupe, qui a fait l’objet d’investigations de mars à décembre 2024, a refusé de transmettre certains éléments et documents à la mission, déclare l’IGAS dans son rapport d’une centaine de pages. Mais les éléments recueillis et analysés « suffisent à démontrer d’importantes carences dans la gestion financière et comptable du groupe ».
L’inspection pointe des « pratiques, parfois intentionnelles, de transmission d’informations erronées à l’administration (communes, CAF) ayant systématiquement pour objet de maximiser les versements de fonds publics ». Certains constats « pourraient relever du champ pénal, notamment l’opération d’externalisation de l’immobilier du groupe ainsi que la perception de PSU [prestation de service unique] par des établissements ayant déclaré avoir cessé leur activité », ajoute l’IGAS.
S’agissant de la qualité de l’accueil, le rapport évoque des « manquements fréquents » au respect des règles d’encadrement et de qualification en crèche, carences relevées « dans 49 % des rapports de visite réalisés par les services de la protection maternelle et infantile en 2023 ».
La mission, qui précise s’être rendue dans dix-sept crèches au cours de son enquête, estime que « la qualité de l’accueil dans les crèches repose sur un niveau d’engagement élevé des professionnels, qui vise à compenser, sans y parvenir systématiquement et au risque de l’épuisement, les difficultés liées à l’optimisation des ressources humaines ».
Récusation de « certaines allégations du rapport »
« Des non-conformités à la réglementation ont été constatées (fausses déclarations, perception de prestations par des moyens frauduleux…), qui conduisent à saisir le procureur de la République au titre de l’article 40 du code de procédure pénale », poursuit l’IGAS.
Dans un communiqué, le groupe La Maison bleue « prend acte de la saisine du procureur sur la base de l’article 40 », et se dit prêt à « apporter toutes les réponses nécessaires devant les autorités compétentes ». Le groupe « récuse certaines allégations du rapport » et regrette « l’absence de prise en compte » d’une « grande majorité des réponses détaillées adressées dans la phase de contradictoire », poursuit le communiqué.
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« Il y a des erreurs administratives, mais je récuse toute intention de fraude », a fait part Claire Laot, directrice générale du groupe, à l’Agence France-Presse. Le groupe est en train de mettre en place « un plan de transformation de 76 mesures », « pour répondre à l’intégralité des points soulevés par l’IGAS », plan qui est « suivi mensuellement avec le cabinet de la ministre des solidarités, Catherine Vautrin », a-t-elle précisé.
Fondé en 2004 en Ile-de-France, le groupe revendique l’accueil de 20 000 enfants au sein de son réseau de 600 crèches, qui s’appuie sur 6 000 collaborateurs et fait état d’un chiffre d’affaires annuel d’environ 300 millions d’euros.
L’image du secteur des crèches privées − dominé par Babilou, Grandir (les Petits Chaperons rouges), People & Baby et La Maison bleue − a été ébranlée par la mort d’un bébé de 11 mois dans une crèche People & Baby à Lyon en juin 2022. Quelques mois plus tard, deux livres-enquêtes (Le Prix du berceau et Babyzness) avaient enfoncé le clou, en jetant une lumière crue sur le mode de fonctionnement de certaines structures privées à but lucratif.