Graver dans la Constitution l’existence des seuls genres masculin ou féminin et la primauté du droit des enfants sur tous les autres : le parlement hongrois a adopté lundi 14 avril un amendement visant à restreindre encore les libertés des personnes LGBT+. Le premier ministre nationaliste, Viktor Orban, qui avait promis en mars « un grand nettoyage de Pâques » contre ses rivaux taxés de « punaises », a aussi fait adopter un texte s’attaquant aux binationaux, jugés des « traîtres à la nation ».
Bête noire du pouvoir, le milliardaire de 94 ans George Soros, né à Budapest et naturalisé américain, pourrait en faire les frais. Avant le vote de cette révision approuvée à une large majorité de 140 voix contre 21, quelques dizaines de protestataires ont bloqué l’entrée du Parlement. Ils ont été rapidement délogés par les forces de police, mobilisées en nombre.
« Quand nous tentions d’entraver la première refonte de la Constitution », en 2011, « jamais nous n’aurions pensé être encore là quatorze ans plus tard », a commenté sur place la députée d’opposition, Timea Szabo. Dans l’Hémicycle, des élus ont déployé une banderole en signe de protestation, tandis qu’à l’extérieur du bâtiment des manifestants scandaient : « On ne se laissera pas » transformer en « Russie de Poutine ».
Une mesure « sans précédent en droit international »
En écho à un décret signé par le président américain, Donald Trump, la Constitution hongroise va désormais préciser qu’une personne est « soit un homme, soit une femme ». Autre texte soumis au vote lundi, celui affirmant « la primauté du droit des enfants à un développement physique, mental et moral correct sur tout autre droit ». Le gouvernement entend ainsi renforcer les bases légales de l’interdiction de la Marche des fiertés, décidée au nom de « la protection des enfants ».
Depuis l’approbation, mi-mars, de cette loi, la capitale vit au rythme des manifestations : des milliers de personnes défilent et bloquent des ponts pendant des heures chaque semaine, et, samedi, une foule a protesté en gris pour symboliser l’uniformité souhaitée selon ses opposants par Viktor Orban.
Dans le viseur également, les binationaux qui menaceraient la sécurité en s’immisçant dans les affaires intérieures « sous le couvert d’ONG et de médias se disant indépendants ». Selon le texte, « la citoyenneté d’un Hongrois détenteur d’un autre passeport pourrait être suspendue », à l’exception des ressortissants de l’Union européenne et de quelques autres pays européens. Une durée maximale de dix ans est prévue, avec une expulsion à la clé pour ceux résidant en Hongrie.
Une trentaine de juristes ont dénoncé une mesure « sans précédent en droit international », qui peut « constituer une forme de bannissement et de traitement inhumain ». Quant à l’opposant Péter Magyar, dont le parti Tisza fait la course en tête selon plusieurs sondages, il est contraint à un exercice d’équilibriste. Cet ancien haut fonctionnaire, longtemps marié à une ex-ministre de Viktor Orban, Judit Varga, s’est mué en critique virulent de la corruption et pose un défi sans précédent au pouvoir. Mais, soucieux de ménager certains électeurs, il n’a pas pris position sur les droits LGBT+.