C’était l’une des ramifications de l’affaire Benalla qui a éclaté à l’été 2018. Dans l’enquête portant sur une possible dissimulation de preuves qu’aurait constituée la disparition de coffres-forts de l’ancien chargé de mission à l’Elysée, une juge d’instruction parisienne a rendu un non-lieu fin juin, a fait savoir, vendredi 30 août, le parquet de Paris, sollicité par l’Agence France-Presse.
L’un de ces mystérieux coffres-forts, que M. Benalla utilisait notamment pour stocker ses armes, n’était plus dans son appartement lors de la perquisition menée en juillet 2018, au début de l’affaire qui lui a valu une condamnation définitive à un an de prison ferme pour les violences commises en marge des manifestations du 1er-Mai de cette année-là. Ce proche d’Emmanuel Macron avait été condamné pour avoir outrepassé son statut d’observateur en participant à plusieurs interpellations violentes de manifestants, sur la place de la Contrescarpe et dans le Jardin des plantes, aux côtés de son ami Vincent Crase, un ex-réserviste de la gendarmerie.
En rendant, le 27 juin, une ordonnance de non-lieu dans l’enquête sur ces coffres-forts, la magistrate instructrice s’est rangée derrière les réquisitions du ministère public. « Le contenu des coffres déplacés du domicile d’Alexandre Benalla susceptibles de contenir des éléments de preuve dans le cadre des enquêtes ouvertes à son encontre n’a pu être établi avec certitude », estime le parquet de Paris. Le ministère public ajoute que, en « l’absence de cet élément et dans la mesure où l’enquête n’a pas établi de volonté de nuire à la manifestation de la vérité, un non-lieu a été ordonné ». Pour l’avocate de M. Benalla, Me Jacqueline Laffont, « ce dénouement était inéluctable en droit comme en fait ». « Il était en effet absurde de poursuivre Alexandre Benalla pour le contenu imaginaire d’un coffre », a-t-elle ajouté.
Crise politique
Six ans après cette affaire, révélée par Le Monde, qui avait fortement secoué le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, la justice clôt donc ce volet, ouvert en février 2019. Cette armoire-forte « a dû être emmenée dans un lieu sûr par une personne, mais ce n’est pas moi qui me suis occupé de cela », avait dit Alexandre Benalla à l’été 2018 aux enquêteurs.
Un an et demi plus tard, un des protagonistes de l’affaire, le militaire Chokri Wakrim, avait mis en cause deux membres de la présidence. Il avait affirmé en janvier 2020 à la brigade criminelle les avoir vus en présence d’un premier coffre dans l’appartement parisien d’une proche de M. Benalla.
Le témoin avait ciblé Christian Guédon, alors membre du groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR), ainsi qu’un ex-conseiller du chef d’état-major particulier d’Emmanuel Macron, Ludovic Chaker, par ailleurs ex-secrétaire général d’En Marche !. Auditionné en juillet 2019, M. Chaker avait reconnu avoir participé à l’exfiltration de la famille Benalla, dont le domicile était encerclé par les médias. Mais il avait « contesté fermement depuis le début avoir déplacé ce coffre », selon son entourage. Son avocat n’a pas répondu dans l’immédiat.
D’autres enquêtes en cours
Chokri Wakrim avait également révélé avoir été témoin d’une conversation pendant laquelle Alexandre Benalla aurait demandé à Christian Guédon de vider un second coffre-fort situé dans son bureau de l’Elysée. D’après Chokri Wakrim, le contenu de ce coffre, vidé juste avant la perquisition du 25 juillet 2018, aurait été emporté dans un sac de sport. Celui qui vit aujourd’hui en Suisse et travaille dans le privé reste visé en France par deux enquêtes.
L’une porte sur son rôle dans la signature de contrats avec des oligarques russes alors qu’il était en poste à l’Elysée, et se rapproche de sa fin. L’autre, lancée en avril 2019, porte sur des soupçons de « faux témoignage » de MM. Benalla et Crase devant la commission d’enquête du Sénat.
Le parquet de Paris avait conditionné à l’époque son issue à celle du volet central de l’affaire, l’enquête sur les violences du 1er mai 2018, qui s’est achevée en juin par une condamnation définitive de M. Benalla à un an de prison ferme après le rejet de son pourvoi. Cette enquête pourrait donc connaître un épilogue prochain.