La Maison et le Monde n’est pas un titre comme les autres, et si la plupart des films de Satyajit Ray (1921-1992) auraient pu le porter, c’est bien que se dessine là une sorte de programme. En effet, le plus grand cinéaste indien bengali a souvent fondé ses films sur cette tension liminaire entre l’intérieur et l’extérieur, le foyer siège des traditions et la société emportée par l’élan du siècle, notamment via ses héroïnes en voie d’émancipation, que ce soit dans La Grande Ville (1963) ou encore Charulata (1964).
Adapté du roman éponyme, publié en 1916, de Rabindranath Tagore (1861-1941), figure de proue de la culture bengalie, ami de la famille de Ray qui a plus d’une fois porté ses œuvres littéraires à l’écran, La Maison et le Monde fut un projet de longue date du cinéaste, porté et reporté pendant près de trente ans, alors qu’il avait d’abord envisagé d’en faire son premier film. Il l’a finalement tourné en fin de carrière, en 1983, moins de dix ans avant sa mort, chef-d’œuvre de la maturité qui résonnait vivement, dans l’Inde du début des années 1980, avec une montée des tensions sociales et communautaires – Indira Gandhi était assassinée en octobre 1984.
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