La voix des New York Dolls, David Johansen, s’est éteinte. Le chanteur de la formation américaine punk qui avait émergé dans les années 1970 est mort, vendredi 28 février, à son domicile de New York, a annoncé, à l’agence Associated Press, le porte-parole de sa famille, Jeff Kilgour. Agé de 75 ans et dernier membre survivant du groupe, David Johansen avait révélé, en début d’année, qu’il souffrait d’un cancer de stade 4 et d’une tumeur au cerveau.
Les New York Dolls ont été les précurseurs du punk rock, et le style du groupe – cheveux décoiffés, vêtements féminins et maquillage – a inspiré le mouvement glam qui s’est invité dans le heavy metal une décennie plus tard avec des groupes comme Mötley Crüe, Poison ou les Finlandais de Hanoi Rocks. Le magazine de mode Vogue qualifiait les « Dolls » de « durs à cuire grimés en boas et en talons ».
« Quand on est artiste, la principale chose que l’on veut faire est d’inspirer les gens, alors si on y parvient, c’est très gratifiant », déclarait David Johansen au Knoxville News-Sentinel en 2011.
Pas de succès commercial
Les Dolls – dont la formation originale comptait dans ses rangs les guitaristes Johnny Thunders et Sylvain Sylvain – ont côtoyé Lou Reed et Andy Warhol dans le Lower East Side au début des années 1970. Les « poupées de New York » tirent leur nom d’un hôpital pour enfants de Manhattan et étaient censées reprendre le trône laissé vacant par le Velvet Underground. Mais aucun de leurs deux premiers albums – New York Dolls sorti en 1973 et Too Much Too Soon un an plus tard – ne fut vraiment un succès commercial.
Dans sa critique de leur deuxième album, le magazine de référence Rolling Stone qualifiait pourtant les New York Dolls de « meilleur groupe de hard-rock d’Amérique du moment », et voyait en David Johansen « un showman talentueux, avec une capacité étonnante à donner vie à des personnages en tant que parolier ».
A la fin de leur première tournée, les Dolls étaient gérés par le légendaire promoteur Malcolm McLaren, qui allait plus tard initier les Sex Pistols, autre référence du punk, à leur musique.
Parmi leurs chansons réputées, figurent Personality Crisis, Looking for a Kiss, ou encore Frankenstein. L’emblématique groupe de rock Guns N’Roses, dont le bassiste Duff McKagan est un grand fan des Dolls, reprendra le morceau Human Being dans l’album The Spaghetti Incident ? sorti en 1993 pour rendre hommage à ses influences punk.
Retour du groupe dans les années 2000
Déchirés par des conflits internes et leurs addictions à la drogue, les New York Dolls se séparent après leurs deux premiers opus, au milieu des années 1970. En 2004, Morrissey, ancien leader des Smiths et admirateur des Dolls, convainc David Johansen et les autres membres survivants de se reformer pour le festival Meltdown en Angleterre, ce qui a ensuite donné vie à trois albums studio.
Le groupe a été nominé à plusieurs reprises au Rock & Roll Hall of Fame (le temple de la renommée), mais n’y est jamais entré.
Pour le guitariste américain Steve Stevens, qui accompagne notamment Billy Idol, les Dolls n’ont jamais été axés sur la technique. « Il s’agissait en fait du son du métro, des poubelles puantes qui débordent, de marginaux de Times Square. Les Dolls l’ont fait à la perfection. Bon voyage David Johansen », a-t-il écrit sur X.
« David Johansen est l’un de ces chanteurs, pour être un peu paradoxal, qui est techniquement meilleur et plus polyvalent qu’il n’y paraît », écrivait le Los Angeles Times en 2023. « Sa voix a toujours été un peu comme une corne de brume – plus ou moins aiguë selon l’âge, les habitudes et les chansons – mais elle possède une rare urgence émotionnelle », estimait le quotidien californien.
« Faire tomber les murs »
Le look glamour du groupe avait pour but d’accueillir les fans dans un espace dénué de cadre et de jugement. « Je voulais juste être très accueillant, expliquait David Johansen dans un documentaire, parce que la société actuelle est très stricte – hétéro, gay, végétarien, peu importe. Je voulais juste faire tomber les murs, faire la fête. »
Après la première disparition des New York Dolls, le chanteur crée son propre groupe, le David Johansen band, avant de se réinventer dans les années 1980 sous le nom de Buster Poindexter, un alter ego au style pompadour, avec lequel il connaît un certain succès grâce au morceau kitsch Hot, Hot, Hot.
David Johansen est également apparu dans des films tels que Candy Mountain (1987), Deux Dollars sur un tocard (Let It Ride, 1989) avec Richard Dreyfuss, et a joué un rôle mémorable en tant que fantôme de Noël dans le film Fantômes en fête (Scrooged, 1988) avec Bill Murray.