Puisque ces juges nous condamnent, feignons d’en être les victimes ! C’est ainsi que se décline la stratégie de nombre de responsables politiques : se draper de lin blanc et de probité candide quand ils sont poursuivis ; crier au procès politique quand ils sont condamnés. Le privilège des élus est de bénéficier d’une tribune pour tenter de détourner la colère vers les juges qui condamnent et la presse d’intérêt général qui rend compte.
Il flotte pourtant une atmosphère de défiance : selon l’Agence française anticorruption, 69 % des Français considèrent que la corruption est largement répandue dans le pays. La France a d’ailleurs dévissé dans le classement de Transparency International qui établit l’Indice de perception de la corruption, définie comme la capture de l’intérêt général par des intérêts privés.
Au-delà des outrances des protagonistes du procès, l’affaire des parlementaires du Front national (devenu depuis Rassemblement national) s’est singularisée par un fait nouveau : le temps, pourtant pas si lointain où, lorsqu’un élu était condamné, les autres ne manquaient pas de s’en distancier, semble révolu. D’une voix débarrassée du grain du scrupule, nombre d’élus, qui ne sont des alliés ni objectifs ni officiels du Rassemblement national, ont cru opportun de prétendre que nous serions allés trop loin dans la moralisation de la vie publique et qu’il faudrait revenir sur la peine d’inéligibilité. Faut-il rappeler, qu’en 2016, à l’époque de l’affaire Cahuzac, 85 % des citoyens souhaitaient que cette peine soit définitive ?
Il est peu de dire que ce récit n’a pas convaincu, tant il a été perçu comme la marque de l’entre-soi et d’une certaine arrogance sociale. Surtout quand ceux qui s’offusquent de devoir répondre de leurs actes devant la justice sont les mêmes qui exigent qu’elle se montre implacable avec les justiciables ordinaires, à coups de peines planchers et autres exécutions provisoires.
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