Selon le baromètre industriel de l’Etat dévoilé jeudi 13 mars, la réindustrialisation de la France a nettement reculé en 2024, en particulier sur le plan des créations nettes d’usines. Il s’agit d’une première depuis 2022, année de mise en place de cet outil. « D’autres indicateurs des services de l’Etat » prévoient pour 2025 « une poursuite de cette tendance » au ralentissement, précise le baromètre.
Le baromètre industriel, élaboré par le ministère de l’économie, a recensé l’an dernier 114 ouvertures de nouvelles usines en France, alors que 119 usines ont fermé, soit un solde net de − 5 usines. Si l’on y ajoute les transformations significatives de sites industriels existants (152 « extensions significatives » et 58 « réductions significatives »), le solde total atteint + 89 sites, soit moitié moins (− 53 %) qu’en 2023.
Parmi les secteurs porteurs en 2024, on trouve l’industrie verte et les secteurs de l’énergie et de l’économie circulaire, ainsi que la santé et l’agroalimentaire, selon le cabinet du ministre de l’industrie, Marc Ferracci. A l’inverse, sans surprise, l’automobile a souffert, tout comme les secteurs gourmands en énergie que sont la plasturgie et la mécanique.
« La réindustrialisation se poursuit mais connaît un ralentissement », déclare le ministère dans un communiqué. Le cabinet de M. Ferracci explique ce ralentissement par « une conjoncture qui reste morose en France, mais aussi au niveau européen, voire mondial » et l’instabilité géopolitique, laquelle « génère de l’incertitude » pour les acteurs économiques, susceptible de « ralentir les décisions d’investissement structurantes ».
Ce coup de frein est confirmé par un autre baromètre, celui du cabinet Trendeo, pour qui le solde net de créations d’emplois dans l’industrie est resté positif mais a reculé de plus de 60 % en 2024, à 31 223 emplois, contre 81 637 l’année précédente. « Cela résulte d’un double mouvement de montée des suppressions d’emplois (+ 77 %, soit 28 000 emplois supprimés en plus) et de baisse des créations (− 18 %, soit 22 000 créations en moins) », précise cette étude, publiée mardi.
Réarmement de la France
La France a ainsi connu en 2024 une « augmentation du niveau des défaillances d’entreprises tous secteurs confondus (+ 13 %) », en raison d’un rattrapage post-Covid puis de la crise énergétique, comme le souligne une étude de la direction générale des entreprises (DGE), qui dépend de Bercy.
Le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a dénoncé mercredi le « baratin sur la souveraineté » du gouvernement et son « mépris des gens », lors d’une visite à l’usine chimique Vencorex, qui risque depuis des mois d’être en liquidation.
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Le pays a également connu une accélération du nombre de plans de sauvegarde de l’emploi (+ 34,8 %) et une baisse des investissements directs étrangers (− 7 %). Un motif d’espoir, toutefois, demeure : l’activité industrielle reste « le premier poste de décisions d’investissements » et représente 28 % du total, rappelle le ministère.
Emmanuel Macron avait demandé dans son allocution télévisée le 5 mars au gouvernement d’« être mobilisé » pour que le réarmement des pays européens, incité par le rapprochement entre les Etats-Unis et la Russie, « renforce nos armées le plus rapidement possible » et « accélère la réindustrialisation dans toutes nos régions ».
Le premier ministre, François Bayrou, se rend à cet effet jeudi en fin de journée au chevet des usines tricolores, au salon Global Industrie, à Lyon, accompagné de M. Ferracci, et de la ministre du travail, Astrid Panosyan-Bouvet. M. Bayrou y défendra la « souveraineté industrielle » de la France comme la souveraineté « européenne », avant de visiter vendredi un site TGV d’Alstom à La Rochelle, selon son entourage.
Par ailleurs, le chef de l’Etat réunira vendredi les industriels de la défense français, appelés à augmenter leur cadence depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, en 2022, et qui doivent se préparer à un afflux potentiel de nouvelles commandes.