La Cour suprême russe a annoncé, jeudi 17 avril, valider le retrait des talibans de la liste des organisations terroristes en Russie, une mesure symbolique visant à renforcer les relations entre Moscou et Kaboul, isolé sur la scène internationale. « La décision entre en vigueur immédiatement », a déclaré le juge chargé du dossier, Oleg Nefedov, à l’issue d’une audience à huis clos, selon les agences de presse russes.
Cette décision n’équivaut toutefois pas, à ce stade, à une reconnaissance formelle du gouvernement taliban, de retour au pouvoir depuis 2021. A Kaboul, le ministre des affaires étrangères, Amir Khan Muttaqi, a remercié Moscou et salué un « développement important » dans les relations bilatérales, d’après un communiqué de son bureau.
« Avec cette décision, le seul obstacle restant à plus de coopération politique et économique a été levé », a estimé le ministre, lors d’une rencontre avec l’ambassadeur russe, Dmitry Zhirnov. Celui-ci s’est félicité d’une « décision historique », d’après le communiqué de la diplomatie afghane.
En mars, le parquet russe avait demandé à retirer les talibans de la liste des organisations désignées « terroristes » en Russie et, par conséquent, interdites, sur laquelle ils se trouvaient depuis 2003, dans le contexte de l’après-11 septembre 2001.
Relations diplomatiques de fait
Les talibans s’étaient emparés, le 15 août 2021, de Kaboul, la capitale afghane, après l’effondrement du gouvernement soutenu par les Etats-Unis, suivi quelques jours plus tard du retrait complet des troupes américaines. Depuis, Moscou a entrepris de normaliser ses liens avec le nouveau gouvernement afghan, qu’il perçoit comme un potentiel partenaire économique et dans la lutte contre le terrorisme.
Celui-ci n’a cependant officiellement été reconnu par aucun pays à ce stade, du fait notamment de la situation désastreuse des droits des femmes en Afghanistan. Toutefois, outre la Russie, le Pakistan, la Chine, l’Iran, ou la plupart des pays d’Asie centrale entretiennent des relations diplomatiques de fait avec les autorités talibanes.
Moscou a reçu à plusieurs reprises des émissaires talibans sur son sol, avant même leur retour au pouvoir. Le rapprochement entre le Kremlin et Kaboul a semblé s’accélérer à la suite d’un attentat, en mars 2024, près de Moscou : 145 personnes avaient été tuées dans une salle de concert par quatre tireurs du groupe Etat islamique au Khorassan (EI-K), la branche régionale de l’organisation djihadiste présente en Afghanistan.
Des « alliés dans la lutte contre le terrorisme »
En juillet 2024, le président russe, Vladimir Poutine, avait dit considérer les talibans comme des « alliés dans la lutte contre le terrorisme ». Puis il avait signé, à la fin de 2024, une loi permettant aux autorités russes de retirer le nom d’un groupe inscrit sur la liste des organisations terroristes. Selon ce texte, l’interdiction d’une organisation peut désormais être « temporairement suspendue » par la justice en cas « de preuves réelles » que ledit groupe a cessé de promouvoir « le terrorisme ».
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Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, avait, lui, en octobre, appelé l’Occident à lever les sanctions visant l’Afghanistan et à prendre la « responsabilité » de la reconstruction de ce pays ravagé par des décennies de guerre. Le secrétaire du Conseil de sécurité russe, Sergueï Choïgou, s’est rendu à la fin de décembre à Kaboul, lors d’une rare visite d’un haut responsable étranger, pendant laquelle il avait déclaré vouloir renforcer la « coopération » avec l’Afghanistan.