En décembre 2024, après plus de vingt-cinq ans de négociations, l’Union européenne (UE) et le Mercosur ont conclu un accord pour un traité de libre-échange, avec une ratification espérée avant la fin de 2025, malgré quelques derniers obstacles. Les institutions européennes doivent, notamment, s’entendre sur des mesures additionnelles de sauvegarde du monde agricole demandées par certains Etats membres, dont la France. Mais au-delà des risques, réels ou exagérés, pour l’agriculture européenne, ce traité est un pilier de la stratégie de la Commission européenne pour libérer le continent de ses dépendances historiques envers des partenaires commerciaux ressemblant de plus en plus à des rivaux systémiques, la Chine et les Etats-Unis en tête. L’accord avec le Mercosur est emblématique des tiraillements actuels de l’UE, entre ambitions environnementales et considérations géopolitiques.
D’un point de vue environnemental, pas de doute : comme en témoignent toutes les études d’impact réalisées, cet accord va dans le mauvais sens. Le rapport de la Commission d’évaluation au premier ministre de 2020 estime qu’il entraînerait une déforestation additionnelle de 700 000 hectares, liée à l’accroissement de la production de viande bovine (et ce sans compter la déforestation liée à l’alimentation de ces bovins). Le même rapport prévoit, du fait de l’accord, une hausse totale des émissions de gaz à effet de serre de 500 millions de tonnes de CO2, soit 0,1 % des émissions annuelles mondiales.
L’étude mandatée en 2025 par la Commission européenne propose une estimation beaucoup plus optimiste de ces impacts avec une hausse estimée des émissions « négligeable » (de l’ordre de 0,0006 %) et une déforestation supplémentaire de 670 hectares par an.
Résultats fragiles
Pour établir ces estimations, la direction générale au commerce de l’UE a utilisé un modèle de prédiction qui présente certaines limites. Les impacts environnementaux n’y sont considérés que comme des conséquences de prédictions économiques, basées sur des hypothèses très optimistes (plein-emploi, mobilité parfaite de la main-d’œuvre, etc.). Ses résultats sont donc fragiles. De plus, étonnamment, l’estimation de déforestation n’utilise pas la méthodologie d’évaluation des impacts des accords commerciaux sur la biodiversité, développée pour la direction générale au commerce, avec la contribution l’Institut pour la politique environnementale européenne, en 2021. Son utilisation aurait pu amener à une estimation supérieure de l’impact de l’accord en matière de déforestation.
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