C’est une sévère mise en garde que l’Agence française anticorruption (AFA) a adressée à la Fédération française de football (FFF), au terme d’un contrôle qui s’est étalé de juin 2022 à juillet 2023. L’instance, qui dispose d’un pouvoir administratif lui permettant de vérifier la réalité et l’efficacité des mécanismes mis en œuvre pour lutter contre les atteintes à la probité, a émis un rapport en janvier. Ce document confidentiel d’une centaine de pages, révélé par Marianne et dont Le Monde a pris connaissance, liste treize recommandations à appliquer d’ici à la fin de l’année 2024.
Des mesures ont été amorcées par la FFF dès 2019 « avec la réalisation d’une cartographie des risques d’atteinte à la probité », tandis qu’elle s’est dotée, trois ans plus tard, « d’un code de conduite commun avec la Ligue de football professionnel et d’un dispositif d’alerte interne », note l’AFA. Néanmoins, elle n’a que très peu de procédures formalisées et son dispositif de contrôle est « lacunaire ». Pour l’instance, la fédération, délégataire d’une mission de service public, doit « renforcer la prévention des conflits d’intérêts dans le processus d’achat » et « opérer la mise en concurrence systématique prévue par la procédure interne ».
Parmi les failles observées, l’AFA relève que, « malgré l’existence d’une procédure d’achat à partir de 2022 », notamment pour les montants supérieurs à 100 000 euros, « dans les faits (…) de nombreux contrats dépassant ce seuil sont conclus de gré à gré sans mise en concurrence ». En février et mars 2023, ladite procédure n’a pas été respectée. Or si ces « écarts » ont été annoncés et validés par la commission des finances de la FFF, cette dernière n’a pas justifié « cette tolérance ».
Par ailleurs, l’agence anticorruption n’a pas été en mesure « d’apprécier le rôle précis du comité exécutif de la FFF », en mars 2023, dans le renouvellement de plusieurs partenariats. Elle « constate l’insuffisante maîtrise des risques d’atteintes à la probité dans le cadre des relations commerciales de la fédération avec ses partenaires, y compris avec ceux sélectionnés à l’issue d’une consultation ».
Elle met également en avant des « situations de conflits d’intérêts », notamment, comme l’a relevé Marianne, les liens « forts » entre l’ex-président Noël Le Graët, démissionnaire en février 2023, et une société bretonne, prestataire de la FFF et membre du conseil d’administration du club En Avant de Guingamp, lequel a été présidé jusqu’en 2011 par M. Le Graët (dont le groupe agroalimentaire siège également au conseil d’administration du club) – puis par son gendre durant neuf ans.
Il vous reste 67.3% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.