De nos jours, les enfants de huit ou dix ans regarderaient probablement E.T., l’extraterrestre, de Steven Spielberg (1982), comme une sorte d’archive très lente d’une époque où il n’existait ni Internet, ni effets spéciaux ultra-réalistes, ni téléphone portable. Ceux de 1982, dont l’auteur de ces lignes, avaient découvert, subjugués, l’histoire du petit alien sauvé par une bande de copains, dans une scène mémorable, où les garçons échappent à la police en BMX, sur fond de musique dramatique.
C’était l’époque des magnétoscopes importés massivement du Japon, au point de déclencher une guerre commerciale entre les deux pays, et il devenait possible de revoir le film à l’infini sur VHS. Même Le Monde, qui a souvent aimé détester le cinéma populaire, s’était ému, sous la plume de Jean de Baroncelli, au moment de la scène finale lorsque E.T. repart vers sa planète, laissant son meilleur ami, Elliott. « Viens », dit le premier. « Reste », répond le second – on n’en dira pas plus afin de ne pas spoiler la fin du film pour les enfants de 2024. « Et voilà que s’effondrent nos défenses, qu’est balayée notre crainte d’être dupe, escamotée notre lucidité, anéanti notre scepticisme, voilà qu’à regarder s’embrasser cet enfant et ce nabot caoutchouteux notre gorge se noue », écrit donc le journal avec une larme inhabituelle.
Mardi 30 et mercredi 31 juillet, des gorges vont se nouer autour de la Place de la Concorde, à Paris. Le BMX, qui doit tant à Spielberg, se présente aux Jeux olympiques pour la deuxième fois, après Tokyo, dans sa version freestyle, avec des éliminatoires le premier jour, pour douze athlètes, la finale pour les neuf meilleurs, le deuxième jour. Les règles sont assez simples dans l’esprit : pendant 60 secondes, à deux reprises, les cyclistes montés sur leurs vélos à petites roues (20 pouces), pédalent comme des Schtroumpfs (il n’y a qu’une seule vitesse) pour multiplier des figures sur des rampes qui semblent immenses au profane.
Tête en bas et pirouette
Dans l’inimitable langage urbain, cela s’appelle des Barspin, des Bunnyhop, ou des Rollback, et il faut imaginer les corps et les vélos tourner dans tous les sens, tête en bas, pirouette, accélération et virages serrés. Comme toujours, les règles sont plus complexes dans la pratique olympique : un jury de cinq experts attribue des notes entre 0 et 99,99 en fonction des figures, de leur style, de leur amplitude, de la prise de risque et des lignes réalisées. Au premier tour, les deux runs débouchent sur une moyenne. Pour la finale, le meilleur passage est retenu.
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