Apparu tardivement sur la scène de la musique contemporaine, dont il ne suivait pas les préceptes avant-gardistes, le Hongrois György Kurtag a patiemment, et parfois douloureusement, fait entendre une voix qui, sans jamais prétendre à la modernité, s’est toujours exprimée avec des accents inouïs. De ce point de vue, l’album Lines of Life (« lignes de vie »), qui paraît à l’occasion du 99e anniversaire du compositeur, né le 19 février 1926, a tout d’une œuvre de Kurtag.
Une forme qui joue avec les références passées (des lieder de Franz Schubert alternent avec des pages du grand Magyar inspirées par le poète Friedrich Hölderlin), une intimité propre à la musique de chambre (domaine dans lequel « l’oncle György » a fait autorité – dans tous les sens du terme) et une intention globale qui relève du message (les notes choisies par cet adepte de la mise en abyme ont toujours un sens autre que musical).
Les œuvres de György Kurtag s’apparentent souvent à des hommages post-mortem. Cet album ne déroge pas à la règle et pourrait porter la mention « in memoriam Marta ». Nombreux sont, en effet, les poèmes qui évoquent le souvenir d’une bien-aimée ou qui portent tout simplement l’empreinte de la pianiste Marta Kurtag, l’épouse du compositeur, morte en 2019. Saluer la mémoire de celle qui a toujours été son « premier public » conduit György Kurtag à faire en quelque sorte ses adieux, lui qui, depuis la création en 2018 de son opéra Fin de partie, a peu écrit, en dehors de multiples révisions.
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