Serge Atlaoui, Français de 61 ans condamné à mort en Indonésie en 2007 pour trafic de drogue – accusations qu’il a toujours niées –, a décollé mardi 4 février, dans la soirée indonésienne, pour la France après avoir passé dix-neuf ans de prison, a annoncé Nyoman Gede Surya Mataram, responsable au ministère de la justice et des droits humains indonésien, à l’Agence France-Presse (AFP). Plus tôt dans la journée, il avait été extradé de sa prison indonésienne en vue de son transfèrement.
L’avocat de M. Atlaoui, Richard Sédillot, actuellement en France et joint par l’AFP, s’est dit « particulièrement heureux » du retour de son client et s’est « réjoui que le combat (…) mené se solde par la victoire de la vie sur la mort ». Serge Atlaoui doit atterrir mercredi matin.
A son arrivée en France, Serge Atlaoui « sera conduit à Bobigny [en Seine-Saint-Denis] et présenté au parquet puis probablement placé en détention dans l’attente de la décision sur son adaptation », a déclaré à l’AFP M. Sédillot.
L’avocat interviendra ensuite, « dans un délai de quelques semaines ou quelques mois », devant le tribunal compétent « pour demander qu’une adaptation de sa peine permette sa mise en liberté ». « Serge est heureux et serein », a confié M. Sédillot, « mais il va avoir besoin d’un petit peu de temps pour se réorganiser ».
Demandé officiellement le 4 novembre par la France dans une lettre du ministre de la justice, son retour a été rendu possible par la signature d’un accord, le 24 janvier, entre les ministres français, Gérald Darmanin, et indonésien, Yusril Ihza Mahendra. Dans cet accord, Djakarta explique avoir décidé de « ne pas exécuter » le prisonnier et d’autoriser son retour pour « raisons humanitaires », car « il est malade ». M. Atlaoui a, en effet, suivi chaque semaine un traitement, ces derniers temps, dans un hôpital proche de sa prison.
Djakarta laisse également la liberté au gouvernement français d’accorder « sa clémence, une amnistie ou une réduction de peine » au seul Français actuellement condamné à mort dans l’archipel.
En 2015, Paris a obtenu un sursis de sa condamnation à mort
Serge Atlaoui avait été arrêté en 2005 dans une usine où de la drogue avait été découverte, en banlieue de Djakarta, et les autorités l’avaient accusé d’être un « chimiste ». L’artisan soudeur venu de Metz, père de quatre enfants, s’est toujours défendu d’être un trafiquant de drogue, affirmant qu’il n’avait fait qu’installer des machines industrielles dans ce qu’il croyait être une usine d’acrylique. L’affaire avait fait grand bruit en Indonésie, où la législation antidrogue est l’une des plus sévères du monde.
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Initialement condamné à la prison à vie, il avait vu la Cour suprême alourdir la sentence et le condamner à la peine capitale en appel. Il devait être exécuté aux côtés de huit autres condamnés en 2015, mais a obtenu un sursis après que Paris a intensifié la pression, les autorités indonésiennes ayant accepté de laisser un appel en suspens suivre son cours.
L’Indonésie compte actuellement au moins 530 condamnés dans le couloir de la mort, selon l’association de défense des droits Kontras, citant des données officielles. Parmi eux, plus de 90 étrangers, dont au moins une femme, selon le ministère de l’immigration et des services correctionnels.
Une Philippine de 39 ans, Mary Jane Veloso, arrêtée en 2010 et également condamnée à la peine capitale pour trafic de drogue, a été rapatriée aux Philippines à la mi-décembre, après un accord entre les deux pays. Un autre Français, Félix Dorfin, arrêté sur l’île touristique de Lombok, avait été condamné, au-delà des réquisitions, à la peine de mort en 2019, également pour un trafic de drogue qu’il a toujours nié. La sentence a ensuite été commuée en une peine de dix-neuf années de prison, qu’il purge actuellement.
Selon l’ONG Ensemble contre la peine de mort (ECPM), basée à Paris, en plus de M. Atlaoui, au moins quatre Français sont actuellement condamnés à mort dans le monde : deux hommes au Maroc et un en Chine, ainsi qu’une femme en Algérie.