Sacré défi que de vider de ses œuvres le Musée national d’art moderne (MNAM) avant que ne commencent les travaux du Centre Pompidou qui l’abrite. Dès la fermeture des salles au public, le 18 mars, les équipes avaient une priorité : s’attaquer au « mur Breton ». Soit un fascinant cabinet de curiosités, riche de 255 pièces, fragment de l’atelier parisien que le poète André Breton (1896-1966) occupait au 42, rue Fontaine, à deux pas de Pigalle. « Un musée dans le musée », résume Aurélie Verdier, conservatrice de l’institution, qui vient de lui consacrer un ouvrage de référence, Mur Mondes. L’Atelier d’André Breton (éd. Centre Pompidou).
Derrière son bureau, sur une vaste étagère de bois conçue sur mesure, le chef de file du surréalisme avait précieusement mis en scène ses trésors : quelques toiles de ses amis peintres, Miró ou Picabia, mais surtout des artefacts du monde entier et des curiosités dénichées aux puces de Saint-Ouen.
Masques esquimaux et océaniens, poupées mayas ou katchinas, pierres, racines, oursin fossilisé, moule à hostie, os de baleine gravé, boîte de cigales momifiées, amulette égyptienne… C’est « l’œil à l’état sauvage, œil premier, libre de toute entrave », décrivait Breton, qui cherchait avec cet accrochage unique à abolir toute classification, toute hiérarchie esthétique dans « l’espoir de résoudre l’énigme du monde ». Un véritable pari pour le Musée d’art moderne, qui a confié à son armada ce déménagement des plus délicats.
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