- La crise politique actuelle redonne une place centrale au Parti socialiste, écarté des arcanes du pouvoir depuis de nombreuses années.
- Alors que le gouvernement de François Bayrou devrait tomber lundi prochain, le parti à la rose se dit prêt à le remplacer à Matignon.
- Si la nomination d’un Premier ministre socialiste serait une surprise, en coulisses, il s’agit de négocier un accord de gouvernement et de non-censure.
Suivez la couverture complète
Budget 2026 : le vote de confiance, la dernière carte de François Bayrou
Pour ce parti de gouvernement, duquel sont issus deux anciens présidents de la République, la traversée du désert a été longue. Est-elle sur le point de prendre fin ? Les socialistes veulent y croire. Ces derniers jours, à la faveur de la crise politique et de la chute annoncée du gouvernement Bayrou, le PS est revenu au centre du jeu politique. Son Premier secrétaire Olivier Faure répète à l’envi qu’il est « volontaire »
pour aller à Matignon. Mardi soir sur LCI, il s’est dit à « la disposition »
du président de la République pour discuter « des conditions »
d’un tel scénario. Ce même jour, Emmanuel Macron avait convié les chefs des partis de la coalition gouvernementale pour leur demander de « travailler »
avec le PS, « pour élargir »
son assise avant le vote du 8 septembre, « et le cas échéant après »
.
Ce jeudi 4 septembre, le PS avait rendez-vous avec François Bayrou dans le cadre des consultations entreprises par le chef du gouvernement avant le vote de confiance lundi prochain. À sa sortie, le patron des socialistes a redit qu’ils censureraient l’exécutif, que leur proposition de gouverner tenait toujours et qu’il appartenait au chef de l’État de l’étudier sérieusement. « Dans le périmètre de la gauche qui veut gouverner, à lui de choisir quel sera le ou la Première ministre qui aura son agrément »
, a-t-il déclaré dans la cour de Matignon.
Faure à Matignon ? « Lui-même pense que ça n’arrivera jamais »
Pourtant en coulisses, Olivier Faure ne se fait pas beaucoup d’illusions sur la nomination d’un socialiste au poste de chef du gouvernement. « Jamais il ne nous nommera »
, dirait-il à ses proches ces derniers jours. « Faure lui-même pense que ça n’arrivera jamais »
, confirme un membre de son entourage auprès de Politico
. En effet, il est peu probable que cette option, avec un projet de budget proposant de revenir à la retraite à 62 ans et de mettre en place une taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines, ait les faveurs du chef de l’État.
Pour le PS, l’objectif est ailleurs, il s’agit de conclure un pacte avec le futur gouvernement. Emmanuel Macron pourrait alors nommer un Premier ministre de son camp, mais obtenir des socialistes qu’ils ne le censurent pas. Attention toutefois, les concessions doivent « se voir »
, préviennent certains socialistes échaudés par leurs dernières négociations avec François Bayrou. Le nouveau gouvernement devra accepter de grands marqueurs de gauche, juge par exemple le député PS Laurent Baumel, déplorant que les macronistes soient incapables d’imaginer « qu’on puisse faire 20 milliards de recettes fiscales »
. « Il faut qu’ils se sortent de la tête qu’ils peuvent nous acheter avec deux carottes »
, ajoute-t-il, refusant d’aller « négocier la politique du moindre mal »
comme début 2025.
Des mains tendues chez les macronistes
Si François Bayrou rejette en bloc les idées et les actes de candidature du PS, ce n’est pas le cas de tout le monde au sein de l’ancienne majorité. La semaine dernière, lors de sa rentrée politique, le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, a salué « un grand parti d’opposition responsable »
. La présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a de son côté préconisé d’abandonner la suppression de deux jours fériés et de réfléchir à « des ‘bougés’ sur les fiscalités sur les hauts patrimoines, engager des travaux sur les transmissions de patrimoines, il faut de la justice fiscale, il faut de la justice sociale »
. Des idées chères au PS. Dans Le Monde
, la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin a jugé possible de « discuter de beaucoup de choses avec les socialistes »
, notamment sur la justice fiscale et la taxe Zucman, mais considère que « repousser l’objectif des 3% de déficit public de 2029 à 2032 n’est pas raisonnable »
.
« Nous avons le devoir de trouver un accord »
avec lui, juge un autre membre du gouvernement auprès de l’AFP. « Des concessions sont possibles »
, estime cette source, satisfaite de voir que les socialistes « reconnaissent la nécessité de se doter d’une trajectoire de désendettement »
. Les macronistes comptent d’autant plus sur le PS que ce dernier ne souhaite pas la dissolution de l’Assemblée, comme le Rassemblement national, ni une destitution du président, comme le réclame La France insoumise.
Wauquiez ne censurera pas un gouvernement PS
Ce matin, une autre déclaration est venue ajouter un peu de crédit à une hypothèse socialiste à Matignon, celle de Laurent Wauquiez. Le chef des députés LR a assuré que son groupe ne censurerait « ni un gouvernement PS ni un gouvernement RN »
pour éviter « une instabilité catastrophique »
après l’échec des gouvernements Barnier et Bayrou en moins d’un an. « Tant mieux si Laurent Wauquiez dit qu’il ne censurerait pas ce gouvernement »
, a commenté Olivier Faure, rappelant que toute façon « il n’y a aucune solution majoritaire »
et que le PS a au moins « le mérite de présenter une offre »
. En revanche, LR devra accorder ses violons en interne puisque le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a écrit dans la foulée sur X : « Si un gouvernement socialiste devait mener une politique contraire aux intérêts de la France, le devoir de la droite serait de l’empêcher. »
À gauche, LFI a indiqué qu’elle ne soutiendra un gouvernement dirigé par le Parti socialiste que s’il défend « un programme de rupture »
.