Il y a des concerts qui sont comme des offices religieux, et celui du rappeur Killer Mike, jeudi 29 août à Paris, était de ceux-là : une plongée dans les églises baptistes de sa ville, Atlanta (Géorgie). A la différence que son prêche était tout sauf puritain, rappelant là le droit à l’avortement, honorant la mémoire de son oncle « qui [l’a] laissé fumer un joint et boire de la bière sans que [sa] mère le sache », retraçant son parcours, de l’adolescence à celui d’adulte militant.
L’artiste, également membre du duo Run the Jewels et acteur des manifestations contre les violences policières, soutien public du démocrate Bernie Sanders, a remporté trois Grammy Awards en février, lors de la dernière cérémonie des récompenses de la musique américaine, dont celui du meilleur album rap pour Michael, son sixième album solo, publié après dix ans d’absence. Malgré ce CV impeccable, Killer Mike, attendu au Bataclan, à Paris, a été reprogrammé à La Maroquinerie, faute de billetterie suffisante. Tant mieux, car la petite salle de cinq cents places sied mieux à l’ambiance intimiste instaurée par le rappeur.
Son concert commence par un gospel de sa chorale, The Mighty Midnight Revival, soit quatre femmes et un jeune homme aux voix exceptionnelles, tous habillés de blanc, avec lesquels il a publié, le 1er août, l’album Songs for Sinners & Saints (« Chansons pour les pécheurs et les saints ») : « Voici l’homme du peuple, annonce un de ses choristes, la légende d’Atlanta, le petit-fils de Madame Bettie. Il porte différents noms, mais ce soir, voici sur scène Michael. »
Une réplique en diamants
Et quoi de mieux, pour briser la glace avec le public parisien, que de commencer le concert par un éloge : « Ça fait quatorze ans que je viens jouer en France, rappelle Killer Mike, de son vrai nom Michael Render, et il y a quelque chose que j’admire chez vous, c’est que, quand vous êtes énervés contre la politique, vous allez dans la rue et vous bloquez tout ! Ce n’est pas facile d’être un citoyen lambda, mais je veux vous remercier pour l’exemple que vous donnez à la classe ouvrière du monde entier. »
Plus tard, il racontera que son attachement à la France a été cultivé à l’école en étudiant la Révolution française : « C’est grâce à ce que j’ai étudié en histoire que j’ai compris que, quelle que soit ta race, le problème, c’est ta classe sociale. » Il confie aussi avoir beaucoup fantasmé sur la statue du Louvre, la Victoire de Samothrace. Devenu riche, il a investi une petite fortune pour s’en faire fabriquer une réplique en diamants qu’il a portée en collier : « Je dépense aussi mon argent dans des conneries, mais mes achats ont du sens », plaisante-t-il.
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